Crise sécuritaire au Burkina: le Président Roch Kaboré et son gouvernement sur le fil du rasoir?

Au Burkina Faso, l’opposition vient de donner un ultimatum d’un mois aux autorités pour prendre des "mesures concrètes" contre la dégradation continue de la situation sécuritaire et humanitaire. Faute de quoi, elle menace de descendre dans la rue pour exiger la démission du Président et de son gouvernement.
Sputnik
Après octobre 2014 et la chute de Blaise Compaoré, la récente sortie des responsables de l’opposition fait craindre un possible nouveau bouleversement politique au Burkina Faso, provoqué cette fois par l’insécurité.
En effet, le 9 novembre face à la presse à Ouagadougou, ces derniers se sont voulus catégoriques:

"Si dans un délai d’un mois, rien de sérieux et de concret n’est entrepris pour maîtriser la situation sécuritaire, l’opposition politique en concertation avec des organisations soucieuses de l’avenir de la nation, appellera à des manifestations fortes pour exiger purement et simplement la démission immédiate du chef de l’État et de son gouvernement", a prévenu le chef de file de l’opposition Eddie Komboïgo.

Une menace à prendre au sérieux

Ces derniers mois, l’opposition a déjà laissé entrevoir sa capacité à faire bouger les lignes. Ce fut notamment le cas fin juin quand, pour désamorcer son appel à une mobilisation massive prévue pour début juillet sur toute l’étendue du territoire national, le Président Roch Marc Christian Kaboré avait, dans une adresse télévisée, promis des "mesures fortes" contre l’exacerbation des attaques armées. Dans la foulée, les ministres de la Défense et de la Sécurité avaient été limogés.
Pour l’analyste politique Siaka Coulibaly interrogé par Sputnik, ce fait illustre bien la menace qui pèse sur le pouvoir.

"L’ultimatum ne peut pas avoir été lancé sans considération de la faisabilité de la sanction. L’opposition a déjà organisé des manifestations d’envergure dans plusieurs localités du pays. Elle peut donc récidiver. Et l’on sait très bien les risques que cela fait courir à la stabilité politique du pays. C’est un acte important qu’elle a posé et le pouvoir a bien reçu le message", a-t-il déclaré.

Il se trouve que parallèlement à l’opposition, des organisations de la société civile sont actuellement en "pleine concertation" pour aussi faire pression sur les autorités, comme l’a confié à Sputnik Pascal Zaïda, président de la Coordination nationale des organisations de la société civile pour la patrie (COP). Et une "synergie d’action" avec l’opposition, a-t-il souligné, n’est pas à exclure.

Poussée djihadiste et fracture sociale

Au Burkina Faso, les groupes armés terroristes dont la mobilité et la force de frappe se sont accrues ces dernières années ne cessent de gagner du terrain face à une armée qui manque de ressources et qui n’a plus depuis longtemps la maîtrise de son territoire. Il est estimé qu’au moins un tiers de la superficie du pays (soit au moins 91.400 km²) échappe actuellement au contrôle de l’État. Aussi la plupart des chancelleries occidentales "déconseillent formellement" à leurs ressortissants de s’y rendre.
Depuis octobre 2015, les attaques armées ont fait 2.000 morts, en grande majorité des civils, et poussé officiellement 1,4 million d’entre eux à fuir vers des zones plus sûres.
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Pour l’opposition, c’est "la gouvernance du Président Roch Marc Christian Kaboré qui a gravement englué sans la moindre lueur d’espoir" le pays dans cette crise sécuritaire.

"Il y a un sentiment général d’impuissance au sein de la population, face à l’aggravation continue de la situation sécuritaire. Ces dernières semaines, la pression des terroristes s’est accentuée au Burkina Faso et des zones jusque-là épargnées comme la boucle du Mouhoun ou les Hauts Bassins sont maintenant concernées par les opérations des terroristes. Le phénomène de l’insécurité dure depuis 2016 sans que des perspectives de retour à la normale ne soient perceptibles", a expliqué Siaka Coulibaly.

En six ans de pouvoir de Roch Kaboré, la crise de confiance entre populations et autorités semble avoir atteint une ampleur inédite. Et cela constitue l’un des facteurs du ralliement avéré et non négligeable de plusieurs Burkinabés à des groupes armés.
En effet, quand bien même plusieurs groupes liés pour certains à Al-Qaïda* évoluent dans le pays, les autorités soutiennent que la majorité de ceux qui attaquent le Burkina Faso sont des Burkinabés.
*Organisation terroriste interdite en Russie
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