Contrairement à ce qui est enseigné dans la plupart des écoles de management néolibérales, le sociopsychologue américain Abraham Harold Maslow (1908-1970), un des grands spécialistes de la théorie de la motivation en entreprise, a déterminé huit besoins que chaque individu éprouve, et non cinq, le plus haut niveau étant celui de la réalisation personnelle.
Pourquoi les grandes écoles de gestion néolibérales n’enseignent-elles que les cinq premiers besoins identifiés par Maslow? En quoi consiste, selon ce dernier, le besoin de réalisation? A-t-il appelé à la maximalisation de ces besoins dans la gestion du personnel en entreprise? Pourquoi les sciences humaines, qui s’enseignaient encore dans les écoles de commerce dans les années 1930, ont tout bonnement disparu du cursus des écoles de gestion de nos jours?
Dans ce 22e cours d’"Anti-néolibéralisme", Omar Aktouf, professeur titulaire à HEC Montréal et membre du conseil scientifique d’ATTAC Québec, assure à Sputnik que "les trois derniers besoins, notamment la réalisation de soi, que Maslow n’a jamais hiérarchisé, ne sont pas enseignés, car selon l’idéologie managériale dominante, ceci pourrait avoir des impacts négatifs sur le rendement et la productivité".
Ce management "est devenu dangereux"
"Comme l’explique le prix Nobel en économie et ancien chef économiste de la Banque mondiale, puis du Président Clinton durant huit ans, Joseph Stiglitz, les programmes des écoles de gestion, inspirés du modèle d’économie et de gestion +à l’américaine+, dont la comptabilité, la finance, l’économie, la stratégie, le management traditionnel, le comportement organisationnel et les ressources humaines, sont tellement éloignés de ce qui se passe dans la réalité, tellement idéologisés, manipulés et reposant sur tant de fausses bases qu’ils en sont devenus dangereux, y compris pour l’intérêt à long terme de ceux qui en profitent sans retenue à court terme", explique le Pr Aktouf.
Ce management "est devenu dangereux"
Dans le même sens, il déplore que "les écoles de gestion soient généralement allergiques à la culture, aux humanités, aux disciplines qui exigent de se poser des questions fondamentales, qui poussent plus à réfléchir qu’à agir. La raison tient au fait que la culture implique des questionnements, des inquiétudes, des angoisses, des remises en cause, qui non seulement poussent moins à l’+action+, mais freinent passablement la logique de fructification à outrance du capital. Cette angoisse, ce questionnement sur les fondements, sur les valeurs, est en contradiction avec la volonté de former des gens qui décident vite, qui passent à l’action rapidement".