Le procureur militaire d'Azerbaïdjan a admis, lors d'une conférence de presse tenue le 1er novembre, après des années de silence et de démentis sur ce sujet, que des suspects avaient été torturés dans le cadre de l’"affaire Terter" concernant des dizaines d'Azerbaïdjanais accusés d'espionnage en faveur de l'Arménie, relate le site Haqqin, militant pour la défense des droits de l‘Homme.
Selon le procureur Khanlar Valiev, plus de 100 personnes soupçonnées de haute trahison avaient été soumises à diverses formes de violences physiques pendant plusieurs jours au cours de l'enquête en question. Une procédure pénale avait été ouverte par la suite, a-t-il indiqué.
"Une personne est décédée avant que nous n'entamions l'affaire pénale", a-t-il déclaré. " La torture illégale du personnel militaire a été pratiquée à grande échelle."
Une affaire secrète
L'affaire remonte à mai 2017, lorsque les autorités ont annoncé avoir découvert un vaste complot de soldats et de civils azerbaïdjanais qui auraient coopéré avec les services secrets arméniens pour transmettre des informations permettant à ces derniers de commettre des actes terroristes en Azerbaïdjan.
Des dizaines de personnes avaient alors été arrêtées et concentrées dans la région du Terter dans l'ouest de l'Azerbaïdjan, en partie contrôlée par l’Arménie.
L'enquête et les poursuites dans l’affaire "Terter" se sont déroulées dans le plus grand secret, et le nombre de personnes arrêtées, ainsi que leur sort, n'ont jamais été officiellement rapportés, précise le site Eurasianet.
Des tortures documentées
Des groupes de défense des droits de l’Homme ont documenté une torture massive de suspects. L’Organisation mondiale contre la torture (OMCT) a signalé en avril qu’au moins 78 personnes avaient été détenues et condamnées à des peines allant de 12 à 20 ans, dont 11 étaient décédées des suites de tortures en détention en 2017.
Selon des informations "fiables" provenant de l'ONG "Institut pour la paix et la démocratie" (IPD) citées par l’OMCT, les personnes arrêtées n’avaient pas eu accès à des avocats et avaient été emprisonnées sans décision de justice. En 2018, plusieurs ONG avaient publié un rapport citant les noms de certains militaires victimes de tortures.
En juillet 2018, un rapport d'experts issus des 47 États membres du Conseil de l'Europe avaient critiqué l'Azerbaïdjan pour son usage de la torture. "Le recours à la torture et à d'autres formes de mauvais traitements physiques par la police, par d'autres services appartenant aux forces de l'ordre et par l'armée, la corruption au sein de l'ensemble du système d'application des lois et l'impunité restent systémiques, répandues et endémiques", disait dans un communiqué le Comité pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants (CPT) du CE.
De son côté, jusqu’au 1er novembre 2021, l'Azerbaïdjan n’avait pas donné de détails sur cette affaire, à part un communiqué du 5 mai 2017 faisant état d’une arrestation de militaires accusés d’espionnage pour l’Arménie. Leurs noms n’avaient pas été révélés.