L’état-major général de l’armée ukrainienne a confirmé, sur Facebook, avoir utilisé dans des tirs contre le Donbass un drone de combat turc d'altitude de croisière moyenne Bayraktar. Il s’agit d’une première.
D’après les militaires, Kiev a eu recours au drone le 26 octobre après des tirs près de la localité de Granitnoïé "afin de contraindre l’ennemi à cesser le feu". Le Bayraktar a détruit une installation de tir sans franchir la ligne de contact, ont-ils ajouté.
De son côté, un porte-parole des milices populaires de la république autoproclamée de Donetsk a expliqué que les forces ukrainiennes avaient utilisé leur artillerie près de Granitnoïé. Il a accusé Kiev d’avoir violé les accords de Minsk qui interdisent les vols de l’aviation de combat et de drones étrangers le long de la ligne de contact.
Réactions
Cette frappe a eu lieu la veille d’une réunion du Groupe de contact trilatéral, réunissant des représentants de l'Ukraine, de la Fédération de Russie et de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), créé en 2014 pour faciliter la résolution diplomatique du conflit dans le Donbass, notamment pour appliquer les décisions prises au sein du "format Normandie" qui rassemble la Russie, l'Ukraine, l'Allemagne et la France.
Le représentant russe Boris Gryzlov, cité par le quotidien Kommersant, a noté que cette réunion a été "l’une des plus tendues et des plus difficiles". "On peut constater la poursuite par l’Ukraine de l’escalade de la situation sur la ligne de contact", a-t-il ajouté.
Selon le chef de la diplomatie russe Sergueï Lavrov, l’utilisation d’un drone turc doit "faire réfléchir" tous ceux qui arment Kiev.
Les drones ne peuvent être utilisés que par la mission d'observation de l'OSCE conformément aux accords de Minsk, a déclaré mercredi lors d’un point presse la porte-parole du ministère allemand des Affaires étrangères, Andrea Sasse. "Ces dernières semaines, la Mission spéciale d'observation de l'OSCE a enregistré une augmentation des violations du régime de cessez-le-feu, des armes lourdes ont été utilisées. Cela viole les accords de Minsk, que la Russie et l'Ukraine se sont engagées à mettre en œuvre. […] Nous appelons à nouveau toutes les parties à la désescalade", a déclaré Mme Sasse.
Des propos qui ont fortement déplu à l’ambassadeur d’Ukraine en Allemagne Andriy Melnyk. "Au lieu d’exprimer sa préoccupation", Berlin devrait plutôt "redoubler d’efforts en tant que médiateur" pour organiser une rencontre au "format Normandie" et "remettre Moscou à sa place", a-t-il commenté pour le Bild.
La France s'est dite "préoccupée" jeudi après l'utilisation d'un drone turc dans le Donbass, contraire selon elle aux "mesures de consolidation" du cessez-le-feu, commem l'a déclaré la porte-parole de la diplomatie française Anne-Claire Legendre, citée par l'AFP.
Coopération Kiev-Ankara
L’Ukraine a acheté des drones tactiques Bayraktar TB2 auprès du constructeur turc Baykar début 2019. Le drone possède une tourelle sphérique, installée sous le fuselage, qui permet d’y placer un désignateur laser, et est muni de bombes guidées turques MAM-L fabriquées par la société Roketsan.
Les livraisons par la Turquie de drones Bayraktar TB2 à l’Ukraine risquent de détériorer la situation et de déstabiliser le Donbass, a déclaré mercredi le porte-parole du Kremlin Dmitri Peskov. "Cela ne contribue pas à régler ce problème intra-ukrainien", a-t-il souligné.
Le ministre ukrainien des Affaires étrangères Dmytro Kouleba avait déclaré que l’Ukraine avait acheté à Ankara des drones pour "contenir" la Russie et protéger son territoire. Plus tard, Kiev a fait savoir que l’armée et la société Baykar avaient signé un mémorandum sur la construction d’un centre conjoint de maintenance et de modernisation des drones non loin de Kiev.
Ce jeudi, un drone Bayraktar a de nouveau été repéré près du Donbass, a fait savoir la chaîne Telegram Militarist se référant aux données du site Flightradar24.