Après le Maroc, la Tunisie est le second pays du Maghreb à imposer un pass sanitaire pour l’accès aux espaces publics. La procédure a été annoncée, vendredi 22 octobre 2021, par le décret-loi "relatif au pass vaccinal concernant le virus SARS-CoV-2". Le texte précise qu’il est attribué un pass vaccinal à chaque personne de nationalité tunisienne ou résidant en Tunisie, âgée de 18 ans et plus et ayant achevé son schéma vaccinal. Le principe est le même que dans de nombreux pays qui ont mis en œuvre cette procédure: le pass sera exigé à toute personne majeure souhaitant accéder aux espaces publics couverts. L’article 2 dresse une longue liste de lieux, notamment "les structures et sièges relevant de l’État, des collectivités locales et des instances, les établissements éducatifs et universitaires, les structures de santé publiques, les prisons, les centres de rééducation des enfants délinquants, les cafés, restaurants ainsi que les espaces réservés aux activités de loisirs et des fêtes, et à l’accueil des foires, colloques, manifestations artistiques".
Contacté par Sputnik, le docteur Rafik Boujdaria, chef de service de médecine d'urgence à l'hôpital Abderrahmen Mami, dans la région de Tunis, estime que l’entrée en vigueur du pass vaccinal permettra "d’augmenter le nombre de personnes vaccinées et d’atteindre une immunité collective élevée qui pourrait être d’un niveau de 75%".
La mesure, qui était attendue depuis
plusieurs semaines, a toutefois donné lieu à quelques critiques sur les réseaux sociaux.
Des voix se sont élevées contre certaines dispositions du décret-loi instituant le pass vaccinal, et notamment l’article 6: "le défaut de présentation du pass vaccinal entraîne la suspension de l’exercice de fonctions pour les personnels de l’État, des collectivités locales et des instances, entreprises et établissements publics, et le contrat de travail pour les salariés du secteur privé, et ce, jusqu’à la présentation du pass vaccinal". Parmi elles, celle de Sami Tahri, le porte-parole de l’Union générale des travailleurs tunisiens (UGTT) qui a été particulièrement critique sur sa page Facebook:
Pourtant, le docteur Rafik Boujdaria relève que l’article 6 a fait son effet dès les premières heures de l’entrée en vigueur de cette mesure. "Les mesures prises sur le plan de l’emploi ont provoqué une affluence de nombreux Tunisiens dans les centres de vaccination. Il est évident que les gens ne veulent pas perdre leur travail", raconte-t-il en précisant que les antivax sont minoritaires dans le pays.
Le journaliste politique Hichem Hajji explique à Sputnik que les dispositions contraignantes liées à l’emploi ne peuvent être modifiées et ne peuvent faire l’objet d’un recours. "Il y a certainement des personnes qui considèrent que ces mesures sont contraires au droit du travail. Mais nous sommes dans une situation exceptionnelle qui se caractérise par un gel de la majorité des lois. Le pays est actuellement régi par le Président de la République, le décret n°2021-117 du 22 septembre 2021 qui lui permet de prendre des mesures exceptionnelles. Le décret-loi relatif au pass vaccinal a pour fondement juridique ce décret présidentiel", note Hichem Hajji. Selon lui, toute procédure engagée par un employé devant un tribunal n’aura aucune chance d’aboutir, car les décrets-lois "ne sont pas susceptibles de recours en annulation".
À noter que les principales dispositions de ce décret-loi entreront en vigueur dans deux mois et le resteront pendant une période de validité de six mois.