Depuis juillet 2020, la Chine a augmenté ses achats du gaz naturel liquéfié (GNL) américain, ce qui n’est pas resté sans conséquence. Ainsi l’Europe voit les prix du gaz flamber ces derniers temps, une situation qui risque de se compliquer davantage, prévient la chaîne allemande N-TV, si Pékin et Washington concluent un accord à long terme sur des livraisons.
C’est Reuters qui, se référant à ses sources, a fait savoir le 15 octobre que de grandes sociétés énergétiques telles que Sinopec Corp et China National Offshore Oil Company (CNOOC) sont en train de négocier des contrats à long terme avec des exportateurs de GNL. D’après l’agence, les discussions pourraient déboucher sur des accords de plusieurs dizaines de milliards de dollars.
D’après N-TV, les pourparlers, qui ont commencé au début de l'année, se sont accélérés au cours des dernières semaines sur fond de l'augmentation des coupures d'électricité en Chine. La partie chinoise, poursuit la chaîne, s’attend à ce que les contrats soient signés avant la fin de l'année.
"S'il y a un accord imminent entre les entreprises américaines et chinoises, cela pourrait devenir un problème pour l'Europe. Les installations de stockage de gaz ici ne sont pas aussi remplies que l'année dernière […] Si les pétroliers américains de GNL se dirigent vers l'Asie au lieu de l'Europe, cela risque d'augmenter les prix", constate N-TV.
Faut-il vraiment s'inquiéter?
Lors de la Semaine de l’énergie russe, Vladimir Poutine a pointé la responsabilité américaine pour la situation actuelle, notamment la réorientation des approvisionnements en gaz vers l’Asie. Cependant il n’est pas le seul à avoir évoqué le rôle que le GNL américain jouait dans cette crise.
Le 12 octobre, l'ancien chancelier allemand Gerhard Schrödera déclaré au quotidien Handelsblatt que l'Union européenne et l'Allemagne, qui obtiennent une grande partie du gaz via des gazoducs en provenance de Russie et de Norvège, ne doivent pas compter sur le GNL américain que Washington présente comme une alternative peu coûteuse et abondante.
Il rappelle qu’entre janvier et août 2021, la Chine a importé plus 22% de GNL que l'année précédente, tandis que les importations en provenance de l'UE et du Royaume-Uni ont chuté de 17%. D’après M.Schröder, au cours de cette période, les États-Unis ont quadruplé leurs expéditions vers la Chine.
"D'un côté, les États-Unis demandent à l'Europe de restreindre son commerce avec la Chine, mais de l'autre, ils profitent de l'occasion pour lui vendre du gaz naturel de manière lucrative, pas à l'Europe. La reprise économique en Asie et la demande accrue qui en découle sont donc les facteurs clés des prix élevés du gaz sur le marché mondial", a-t-il souligné.
Pourtant, M.Schröder appelle à ne pas s’inquiéter "même si les gros titres sur une prétendue crise du gaz semblent actuellement dramatiques", car les besoins des consommateurs sont toujours satisfaits en Europe. D’après ses chiffres, malgré le retard dans le remplissage des installations de stockage de gaz, celui-ci se déroule depuis début mai à un rythme similaire à celui des années précédentes. Quant à l’Allemagne, avec ses 23 milliards de mètres cubes répartis dans 47 stockages souterrains elle possède les plus grandes capacités de l'Union européenne. Les réservoirs en Allemagne sont actuellement pleins à 68% alors que dans la plupart des pays de l'UE, les niveaux de stockage atteignent même les 80%.