Facebook, Instagram et WhatsApp, qui comptent trois milliards d'utilisateurs dans le monde, ont vécu une méga panne lundi, plaçant sous le feu des projecteurs certains problèmes des plus grands réseaux sociaux. Des problèmes analysés par des experts turcs de l’informatique dans une interview accordée à Sputnik.
Erkan Saka, chargé de cours à la chaire de l’informatique et des médias sociaux à l'université Bilgi d’Istanbul, estime que cette panne massive est tout à fait logique.
"Aussi décentralisé que puisse paraître l'Internet, il fonctionne en réalité sur la base des infrastructures de plusieurs géants technologiques. Par exemple, le tiers des systèmes Internet mondiaux utilisent les services d'hébergement d'Amazon. Il y a plusieurs années, ce dernier avait connu lui aussi un problème qui avait empêché d'accéder à de nombreux sites. C'est à cause de la monopolisation que l'ampleur de la panne peut atteindre des dimensions aussi impressionnantes, car, après tout, c’est un produit de l'activité humaine", explique-t-il.
D’après Erkan Saka, la récente panne a été causée entre autres par le désir du cofondateur et PDG de Facebook Mark Zuckerberg d’unir tous les produits sur la base de Facebook.
"Lorsque trois services de telle ampleur se retrouvent connectés à l'infrastructure d’une seule et même entreprise, la moindre erreur se répercute immédiatement sur l'ensemble de leur fonctionnement."
Il estime que si Facebook utilisait un autre modèle, décentralisé, il aurait été moins impacté par cette panne.
"Même les géants ne sont pas à l'abri d’erreurs", constate-t-il, convenant qu’une "attaque pirate n’est pas à exclure non plus".
Pour Erkan Saka, un moyen de surmonter la monopolisation des géants informatiques passe par la diversification des outils numériques.
"De nombreuses sociétés utilisent WhatsApp non seulement pour chatter, mais aussi pour partager des documents. Et une dépendance du genre n’augure rien de bon", indique-t-il, rappelant qu’il existe des alternatives plus fiables.
Selon lui, la récente panne a fait ressortir l'importance de diversifier les outils numériques.
Une "cyberpandémie"
Necmi Emel Dilmen, professeur à la faculté des communications de l'université de Marmara, attire pour sa part l'attention sur la centralisation progressive de la structure de l'Internet.
"La panne de Facebook prouve la présence d’un chaos numérique de cette structure de l'Internet. Ce qui peut être qualifié de +cyberpandémie+", précise-t-il.
Il rappelle dans ce contexte que lorsque l’Internet faisait ses débuts, c’était "une sorte de zone de liberté par rapport aux médias traditionnels".
"Mais aujourd’hui, il devient évident que cela ne fonctionne plus comme avant. Il importe d’élaborer et d’adopter des lois antimonopole concernant les médias sociaux", martèle-t-il.
Il relève par ailleurs la nécessité de limiter les possibilités infinies des géants de l’informatique par un cadre de logique et de bon sens d’une législation antimonopole.
"Cette situation [la panne, ndlr] nous a montré le peu de fiabilité de ces outils numériques largement répandus […]. Aujourd'hui, nous laissons aux monopolistes toute notre force, en la concentrant dans nos profils Internet. Dans ces conditions, les lois doivent être du côté des utilisateurs."
Chute de la fortune de Zuckerberg
Une panne massive a frappé le 4 octobre Facebook et les différents services du réseau social principal, comme Messenger, Instagram, WhatsApp et même les jeux Oculus. Après que les utilisateurs ont constaté le problème et laissé des commentaires, Facebook s’est manifesté pour informer être au courant du problème.
"Nous sommes conscients que certaines personnes ont du mal à accéder à nos applications et produits. Nous travaillons pour que les choses reviennent à la normale le plus rapidement possible, et nous nous excusons pour tout inconvénient."
Forbes a révélé que la panne mondiale de Facebook, qui a duré plusieurs heures, a coûté 5,9 milliards de dollars (environ 5 milliards d’euros) à Mark Zuckerberg, repoussant l’homme d’affaires au sixième rang parmi les personnalités les plus riches du monde.