"Le Mali a toute la légitimité pour redéfinir ses partenaires" comme la Russie et la France

Pourquoi les nations occidentales sont-elles soudain préoccupées par la possibilité de la collaboration de Bamako avec un groupe privé de sécurité russe? Décryptage du chercheur Jérôme Pigné pour Le Désordre mondial.
Sputnik
Il peut paraître pour le moins surprenant que les ministres de la Défense de 13 États membres de l’UE, dont la France, s’indignent d’un éventuel accord entre le gouvernement du Mali et une société privée de sécurité russe.
En effet, les mêmes n’avaient jamais rien trouvé à redire aux agissements de sociétés militaires privées américaines et britanniques dans les zones de conflit, comme notamment Blackwater (rebaptisé Constellis), Aegis Defence Services ou G4S proches du pouvoir politique de leurs pays d’origine.
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Les pays occidentaux craignent-ils que leur propre incapacité à stabiliser le Mali –qui a déjà entraîné deux coups d’État militaires depuis août 2020 et une insécurité croissante– ne finisse par leur faire perdre pied dans la région et, en conséquence, des opportunités économiques et de l’influence politique?
Jerôme Pigné, président-cofondateur du réseau de réflexion stratégique sur la sécurité au Sahel et chercheur associé à l’Institut Thomas More, précise que pour l’instant, aucune information officielle n’a filtré sur la signature d’un éventuel contrat entre le gouvernement malien et les Russes. Pour lui, ce qui agite l’actualité géopolitique sous-régionale, ce sont les relations tendues entre le Mali et la France.
"On constate une hausse de la visibilité du sentiment antifrançais dans la capitale malienne. Cela ne veut pas dire que ce soit représentatif de ce que pense l’ensemble de la population."
Le chercheur considère en revanche que ce sentiment général peut changer la perception par les Maliens d’un éventuel rapprochement entre des groupes privés russes et Bamako.
"Le Mali a toute la légitimité pour redéfinir un certain nombre de partenaires. Mais en aucun cas la situation actuelle ne tend vers une rupture en matière de partenariat avec la France qui est sécuritaire et militaire. C’est peut-être une façon de négocier ou de faire monter les enchères."
Jérôme Pigné explique que l’inclusion de la société russe dans la lutte antiterroriste n’exclut d’ailleurs pas nécessairement la France:
"Il n’y a pas de lien concomitant entre le fait que Barkhane soit en train d’être repensée et le fait qu’aujourd’hui on parle de sociétés privées comme Wagner. C’est l’évolution de la situation qui fait qu’aujourd’hui on a ces différentes conjectures mais la France précise bien qu’elle repositionne sa stratégie militaire sur le terrain, elle n’est pas en train de quitter le Mali."
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