Macron, déjà en campagne dans un refuge de la SPA: une visite dictée par les sondages?

L’hôte de l’Élysée s’est déplacé dans un refuge de la SPA pour défendre son bilan sur la question animale. Hélène Thouy, du parti animaliste, y voit une récupération politique d’un thème qui préoccupe de plus en plus les Français.
Sputnik
"Dans notre pays, c’est un sujet important qui touche beaucoup d’animaux et qui touche beaucoup de nos compatriotes." Lors de sa visite dans un refuge SPA de chiens et chats à Gray (Haute-Saône), Emmanuel Macron n’a pas manqué de souligner que "nous sommes un pays attaché au bien-être animal, à la condition animale".
Pour marquer le coup, le chef de l’État a donc choisi de se déplacer ce 4 octobre, journée mondiale des animaux, pour rappeler son action "en faveur des animaux de compagnie, en particulier le plan inédit de lutte contre l’abandon lancé en décembre 2020", a précisé l’Élysée. Une thématique importante puisque chaque année, ce sont près de 100.000 compagnons domestiques qui se retrouvent abandonnés, selon l’association 30 millions d’amis. Un record en Europe!

"À quelques mois de la présidentielle, Emmanuel Macron a bien en tête tous les sondages d’opinion qui montrent que la question animale est une préoccupation grandissante chez les citoyens et qu’il faut évidemment y apporter des réponses", tonne au micro de Sputnik Hélène Thouy, coprésidente du Parti animaliste.

"C’est de l’opportunisme électoral", juge la candidate à l’élection présidentielle. "Il y a donc une volonté de récupérer le potentiel électoral des citoyens qui considèrent que la cause animale est importante."

La cause animale de plus en plus importante

Et de plus en plus: selon un sondage IFOP pour Woopets et publié le 22 septembre, près d’un Français sur deux (47%) affirme que les propositions des candidats en matière de protection animale seront susceptibles d’influencer leur vote, contre 29% en 2012. Or cette attention particulière au bien-être des bêtes concerne 69% des électeurs de Jadot (EELV), 69% des partisans de Mélenchon, mais également 62% de ceux qui compent voter Marine Le Pen. Autre signe que la question animale prend de l’ampleur dans la société: le score aux élections européennes du Parti animaliste. La jeune formation politique avait recueilli 2,2% des suffrages, presque autant que le vénérable Parti communiste (2,5%)!
Le président de la République en a donc profité pour défendre son bilan. En particulier la proposition de loi contre la maltraitance animale. Ce texte prévoit notamment le renforcement des sanctions en cas d’abandon ou encore l’interdiction de vente de chats et de chiens en animalerie ainsi que l’encadrement de ce négoce en ligne. Un dispositif voté par le Sénat le 30 septembre dernier, mais dans une version édulcorée.
En outre, Emmanuel Macron a annoncé un doublement des aides aux refuges, portées à 30 millions dans le plan de relance. Une bonne nouvelle "si cela se concrétise", estime Hélène Thouy. Pour la cofondatrice du Parti animaliste toute évolution positive est la bienvenue: "S’il y a des mesures qui sont favorables aux animaux qui sont adoptées, évidemment on peut s’en réjouir."

Le "en même temps " de Macron sur la question animale

Cependant, les signaux contradictoires de l’exécutif en matière de protection animale l’inquiètent. À l’image de la "division par deux du prix du permis de chasse", le "retour des silencieux sur les fusils des chasse", le possible "retour des chasses présidentielles" et des "chasses traditionnelles qui ont pourtant été jugées illégales par le Conseil d’État", énumère Hélène Thouy.

"Ils essaient de jouer sur tous les tableaux, mais, globalement, le bilan est très défavorable aux animaux. Toutes les promesses qui avaient été faites par Emmanuel Macron en campagne, comme l’interdiction des poules pondeuses en cage, la vidéosurveillance dans les abattoirs ou le broyage des poussins, pour l’instant il n’y a aucune véritables mesures", avance notre interlocutrice.

Des promesses auxquelles n’a pas manqué de faire allusion Emmanuel Macron: "À un Salon de l'agriculture, j'avais pris déjà un œuf par ce que j'étais candidat –à l'époque j'étais candidat–, car je m'étais engagé pour la modernisation dans le secteur des poules pondeuses pour que s'améliore la condition animale." En outre, le chef de l’État s’est félicité que le gouvernement ait "modernisé 150 abattoirs dont 50 ont été équipés de caméras de vidéosurveillance". Une réponse aux critiques des associations pointant l’absence de vidéosurveillance obligatoire au sein des abattoirs dans le projet de loi.
Le Parti animaliste à l’assaut de l’Élysée: «une façon de montrer que la question animale est un thème majeur»
Des résultats qui sont pourtant loin de satisfaire la militante de la cause animale: "Ceux qui sont aux responsabilités politiques ont les moyens de prendre des mesures ambitieuses, mais pour l’instant le compte n’y est pas."
Si la cofondatrice du Parti animaliste n’épargne donc pas le gouvernement, elle fustige également les personnalités politiques qui "ont récemment découvert la cause animale" afin de tenter "de récupérer cet électorat".

"C’est très bien, mais ça ne suffit pas de faire des déclarations, il faut des mesures concrètes pour accompagner le changement de notre rapport à l’animal", conclut Hélène Thouy.

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