Souvent violemment critiquée par les pourfendeurs de la Françafrique, la coopération militaire entre le Cameroun et la France semble au beau fixe. La preuve? Jeudi 23 septembre, les deux pays ont renouvelé deux conventions militaires. Elles ont été signées par le ministre camerounais de la Défense, Joseph Beti Assomo, et l’ambassadeur de France au Cameroun, Christophe Guilhou. La première porte sur l’accompagnement de la France dans la mise à niveau des formations, à l’École supérieure internationale de guerre (ESIG) de Yaoundé. Il est question, a précisé le diplomate français, "de leur [aux troupes camerounaises, ndlr] faire acquérir une méthode de planification interarmées de niveau opératif et leur donner des clés de compréhension de l’environnement politique et sécuritaire régional".
Quant à la deuxième convention, elle consiste en un appui technique de l’ancienne puissance coloniale en ce qui concerne les activités de la Marine camerounaise, notamment dans la sécurisation du golfe de Guinée en proie à la piraterie maritime et aux trafics en tout genre.
La France veut maintenir son influence
Au sujet de cette dernière, le ministre camerounais de la Défense a souligné dans le quotidien gouvernemental Cameroon Tribune que: "Le partenaire français, à travers des exercices d’entrainement conjoints dans le golfe de Guinée, contribue à la remise à niveau de nos équipages et au renforcement de l’interopérabilité entre les deux marines et d’autres marines de la sous-région". Cependant, pour des analystes comme Hippolyte Éric Djounguep, chercheur à Trends Research and Advisory et consultant en géopolitique, cette assistance militaire revêt aussi un caractère géostratégique, dans une région qui, de par sa position stratégique et l’abondance de ses ressources naturelles, intéresse de plus en plus les grandes puissances.
"Le golfe de Guinée est situé à un point stratégique de par ses nombreuses richesses, notamment le pétrole. Cette assistance militaire de la zone permet à la France de maintenir une présence permanente dans cette région, de devenir un acteur clé dans le vaste projet des Routes de la soie du gouvernement chinois. Mais aussi, elle permet d’accroître son influence et de stopper la pénétration russe dans la sous-région", commente l’analyste.
Outre la France, le Cameroun bénéficie également du soutien des États-Unis dans la sécurisation du golfe de Guinée. En 2016, par exemple, Washington a financé la création de six centres d’opérations maritimes à Limbe, Douala et Kribi, sur les côtes camerounaises.
Zone d’activité de la piraterie maritime
En dehors des enjeux de positionnement géostratégique, les eaux du golfe de Guinée constituent un problème de sécurité mondiale. Les attaques de bateaux et les enlèvements pour rançon sont relativement fréquents dans cette zone, considérée comme le nouvel épicentre de la piraterie maritime mondiale, le long de la côte ouest de l’Afrique.
En 2019, le Bureau international maritime, instance internationale de sécurité en mer, y a recensé 82% des enlèvements d’équipages dans le monde. Dans la plupart des cas, ce sont des pirates nigérians qui attaquent les navires et enlèvent des marins dans le but d’obtenir une rançon.
Si les accords militaires entre la France et le Cameroun perdurent depuis l'indépendance du pays en 1960, les deux conventions qui viennent d’être renouvelées avaient déjà été signées une première fois en 2009 et les deux parties "ont librement décidé de procéder à leur renouvellement et à leur mise à jour", a précisé le ministre camerounais de la Défense.