Suite à la rupture du contrat sur la fourniture de sous-marins français à l’Australie, l’ambassadeur français à Canberra et son homologue à Washington ont été rappelés pour consultations par l’Élysée le 18 septembre, un fait rarissime pour la diplomatie internationale.
"Il y a eu une rupture de la confiance. Il faut donc la reconstruire et cela ne se fera pas immédiatement", martèle Philippe Étienne, ambassadeur aux États-Unis, invité le 21 septembre sur BFM TV.
Un rappel pour consultation est "un geste fort qui exprime une position très ferme", mais qui ne signifie pas la rupture des relations, explique-t-il, ajoutant qu’il "ne sait pas encore" combien de temps il va rester à Paris.
Les États-Unis "ne peuvent pas ne pas noter notre réaction", souligne le diplomate le 20 septembre sur RTL.
Le rendez-vous téléphonique prévu entre Emmanuel Macron et Joe Biden, dont le calendrier précis n’a pas encore été établi, pourrait marquer le début d’un réchauffement des relations, avance-t-il, toujours sur BFM TV.
"Nous nous sommes sentis dupés"
Jean-Pierre Thébault, ambassadeur français en Australie, ne cache pas sa crispation.
"Je pense que cela a été une énorme erreur, une très très mauvaise gestion du partenariat, car ce n'était pas le contrat, c'était le partenariat", lâche-t-il devant les journalistes australiens le 18 septembre avant son départ pour Paris, qualifiant la situation "d’incroyable, maladroite, inadéquate, non australienne".
Pour les deux diplomates, le point le plus irritant est la manière dont les Australiens ont communiqué leur décision.
"Les Australiens et les Français ont eu un contact tout l’été. Le 15 septembre, un message est adressé par le gouvernement australien à Naval Group: on apprend que les autorités sont très contentes du fonctionnement du programme. Cette même journée, on a appris la notification qu'on arrêtait le programme. C'est la réalité", expose sur BFM TV Philippe Étienne, ambassadeur aux États-Unis.
Jean-Pierre Thébault ne mâche, lui, pas ses mots, ponctuant que la décision australienne de renoncer à l’offre française a été découverte par la diplomatie française "grâce à la presse, une heure avant l'annonce".
"Alors vous imaginez notre colère, nous nous sommes sentis dupés", explique-t-il le 20 septembre sur ABC Radio international.
La crise
Le 15 septembre, les États-Unis, l'Australie et le Royaume-Uni ont annoncé un partenariat stratégique (AUKUS) comprenant la fourniture de sous-marins américains à propulsion nucléaire à Canberra. De cette manière, l'Australie a rompu le "contrat du siècle" signé en 2016 avec Paris sur la livraison à l'Australie de 12 sous-marins à propulsion diesel.
La décision a déclenché une crise diplomatique majeure. Suite à cette affaire, Paris, qui a dénoncé un "mensonge", une "duplicité" et une "rupture majeure de confiance", ainsi qu’un "mépris" de la part de ses alliés, a rappelé ses ambassadeurs à Washington et Canberra.
De son côté, l’Australie affirme qu’elle avait fait part depuis des années de son inquiétude sur les retards, la hausse des coûts et la pertinence du choix initial concernant les sous-marins français.