"Féministe", comme il se clame, ou "contre-symbole de la lutte contre les violences faites aux femmes", comme l’affirment certaines de ses collègues-avocates?
Le 21 septembre, une plainte a été déposée au tribunal judiciaire d’Évreux pour "menaces" et "violences psychologiques" à caractère sexiste à l’encontre d’Éric Dupond-Moretti, célèbre avocat pénaliste nommé ministre de la Justice en 2020. D’après les informations du Huffington Post et de Mediapart, la plaignante est une collègue, l’avocate pénaliste Nathalie Tomasini, spécialisée dans les
violences faites aux femmes.
Les faits se seraient produits à la cour d’assises d’Évreux (Eure), en février 2020, lors du procès en appel de Jean-Marc Capron, condamné pour l’assassinat de son ex-compagne, d’après la plainte. Nathalie Tomasini et son ex-associée Janine Bonaggiunta représentaient alors la partie civile, tandis qu’Éric Dupond-Moretti défendait l’accusé. Lors d’une interruption d’audience, Éric Dupond-Moretti aurait "clairement menacé de frapper la plaignante avec son poing" et l’aurait traitée de "saloperie de pute", "honte du barreau" qui "hystérise" le procès pénal.
Nathalie Tomasini signale avoir saisi en juin 2020 l’ordre des avocats qui n’a à ce stade pas communiqué sur le sujet.
De son côté, l’entourage du garde des Sceaux dénonce "une tentative de chantage", une accusation "calomnieuse" et même une "instrumentalisation politique".
Ce n'est pas la première plainte à l’encontre de M.Dupond-Moretti, alias Acquittator, pour avoir obtenu de nombreux acquittements au cours de sa carrière de pénaliste.
Le 16 juillet dernier, le ministre a été
mis en examen pour prise illégale d’intérêts. Il lui est reproché d’avoir ordonné de mener des enquêtes disciplinaires sur des magistrats dont lui ou ses clients s’étaient plaints avant sa nomination au gouvernement.
Nommé au poste du ministre de la Justice en juillet 2020, Éric Dupond-Moretti s’est déclaré sympathisant de la cause féministe.
Pourtant, en 2018, il avait vivement critiqué la nouvelle
infraction d'outrage sexiste créée par la loi renforçant la lutte contre les violences sexuelles et sexistes, une "hyper-réglementation", pointait-il alors.
Néanmoins, c’est M.Dupond-Moretti qui a déployé en septembre 2020 le
bracelet anti-rapprochement, dispositif de surveillance électronique qui permet de géolocaliser une personne à protéger et un auteur réel ou présumé de violences conjugales, mesure saluée par des associations qui luttent contre la violence intrafamiliale.
En 2020, dans une tribune au Monde, Me Tomasini qualifiait Me Dupond-Moretti, fraîchement nominé, ainsi que Gérald Darmanin, de "deux contre-symboles de la lutte contre les violences faites aux femmes".
Rendue publique, l’affaire a déjà suscité des réactions. "Si ces faits sont avérés, ils sont inacceptables et indignes. J'apporte mon amical soutien à Me Tomasini", a twitté la sénatrice LR Valérie Boyer.