Après avoir accaparé les esprits à l’Onu, la vente ratée de sous-marins à l’Australie commence à avoir des répercussions à l’échelon national. À la manœuvre devant le Sénat, la ministre des Armées Florence Parly a en effet été huée par les élus, lors d’une séance de questions d’actualité.
Interrogée par le sénateur Rachid Temal (PS) sur le manque d’anticipation du gouvernement dans cette affaire, la ministre a répondu en envoyant une pique à la chambre haute.
"On ne peut pas réécrire l’histoire a posteriori. Ou alors on s’érige en juges et en procureurs, ce qui semble d’ailleurs être l’intention du Sénat", a ainsi déclaré Florence Parly dans l’hémicycle.
Une sortie qui a fait pleuvoir les sifflets et les huées depuis les gradins. La ministre a d’ailleurs été rappelée à l’ordre par le président du Sénat, Gérard Larcher, qui lui a reproché des "provocations" inutiles. Florence Parly avait déjà débuté son intervention en fustigeant une "instrumentalisation du débat politique interne".
Quant à savoir si le gouvernement a vu venir la rupture des contrats, la ministre a répondu par la négative. "La rupture c’est brutal, ça ne s’anticipe pas", a-t-elle lancé devant la chambre.
Elle a confirmé que le Premier ministre australien avait écrit à l’Élysée le jour même où a éclaté la crise, pour vanter la qualité des sous-marins français.
Pas de départ de l’Otan
Si Florence Parly a critiqué "une certaine forme de duplicité" chez ses partenaires australiens, elle a aussi eu des mots durs pour l’Otan et les États-Unis.
"L’attitude des États-Unis à l’égard du programme des sous-marins est une nouvelle illustration du constat que nous faisons depuis des mois: aujourd’hui, le dialogue politique est inexistant au sein de l’Alliance atlantique", a ainsi déclaré la ministre au Sénat.
Pas question pour autant de quitter le commandement militaire intégré de l’Otan, que la France avait regagné sous le quinquennat de Nicolas Sarkozy. La ministre ne se voit pas "claquer la porte", même si elle appelle à réviser le "concept stratégique de l’Alliance".
L’option d’un retrait de l’Otan a pourtant été soulevée par plusieurs personnalités politiques ces derniers jours. Nicolas Dupont-Aignan a notamment esquissé ce scénario au micro de Sputnik, invitant la France à reprendre son "indépendance technologique, militaire et politique". Éric Zemmour a tiré le même constat, dans une vidéo aux accents très gaulliens, que certains ont vue comme une entrée en campagne.
Le 16 septembre, le Premier ministre australien Scott Morrison avait confirmé l’annulation d’un contrat de 90 milliards de dollars australiens (56 milliards d’euros) avec la France, portant sur des sous-marins conventionnels de classe Attack. Canberra a finalement préféré se tourner vers des sous-marins nucléaires américains.
Cette volte-face a débouché sur une crise diplomatique entre la France et l’Australie, mais aussi les États-Unis et le Royaume-Uni. Paris a décidé de rappeler ses ambassadeurs dans ces trois pays. Le sujet a rejailli jusqu’à l’Onu. Joe Biden et Emmanuel Macron se sont entretenus ce 22 septembre.