Alors que la tension est déjà à son comble dans la Manche, à cause des flux migratoires que Londres entend endiguer, les presses française et britannique jouent-elles à se faire peur avec la menace russe? Plusieurs médias ont en effet fait leurs gros titres sur le passage du navire océanographique Yantar au large du Cotentin, le qualifiant de «navire espion».
Le quotidien 20 Minutes a ironisé sur «l’œil de Moscou», quand le Times a parlé de navire conçu pour effectuer des «missions sous-marines clandestines». Cet espion venu du froid ne semble pourtant pas avoir inquiété les autorités outre mesure. La préfecture maritime affirme avoir suivi les déplacements du bâtiment et n’y avoir rien trouvé d’«illicite», rapporte La Presse de la Manche.
Le «navire espion» s’est bien signalé aux autorités compétentes et émet via un traditionnel système d'identification automatique (AIS), précise encore la préfecture.
«Il s’annonce au centre régional opérationnel de surveillance et de sauvetage, il affiche son AIS, il navigue donc en sécurité. Pour autant, c’est de notre responsabilité de le vérifier. Et tout simplement de le surveiller», explique à France 3 Véronique Magnin, porte-parole du préfet maritime de la zone Manche–mer du Nord.
Plusieurs analystes ou simples passionnés ont d’ailleurs pu suivre les mouvements du navire sur des sites recensant le trafic maritime.
Fake news
Ce n’est pas la première fois que le Yantar essuie des accusations d’espionnage infondées. En mai 2020, plusieurs médias l’avaient ainsi accusé d’avoir surveillé le Suffren, premier sous-marin nucléaire français de type Barracuda.
Les rumeurs affirmaient alors que le Yantar avait pris contact avec un autre pétrolier russe, qui aurait laissé traîner ses oreilles dans le sillage du Suffren. La préfecture maritime de la Manche avait fini par démentir, affirmant que ce pétrolier russe ne se trouvait pas «dans la zone d’évolution du Suffren».
Navire océanographique, le Yantar (ambre en français) avait notamment participé aux opérations de recherches du sous-marin argentin San Juan, disparu en 2017. Une quinzaine de pays avaient d’ailleurs dépêché des navires pour participer à ces investigations, au large de la Patagonie. Après un an de recherche, l’épave du bâtiment avait été retrouvée par 800 mètres de fond. L’enquête avait conclu à une implosion, due à la défaillance d’une vanne de ventilation. Le naufrage avait coûté la vie à 44 marins.