Anne Hidalgo, simple «reine des bobos» ou adversaire politique n°1 d’Emmanuel Macron en 2022?

Anne Hidalgo a annoncé sa candidature à la Présidentielle. La maire de Paris se pose en premier opposant de Macron. Pourra-t-elle convaincre la gauche et les sceptiques? Réponses avec le député François-Michel Lambert et le sondeur Jean-Daniel Lévy.
Sputnik
«Le monde de demain, c’est Anne Hidalgo qui l’incarne, certainement pas la Macronie», lance François-Michel Lambert au micro de Sputnik.
Pour le député Liberté Écologie Fraternité (LEF), aucun doute: la maire de Paris est la candidate idéale pour mener la gauche à la victoire en 2022. Cela tombe bien, l’édile socialiste s’est officiellement déclarée candidate à la Présidentielle, ce dimanche 12 septembre. «Je me réjouis évidemment de cette annonce, car cela fait longtemps que je souhaite voir une femme incarner une autre façon de faire de la politique en France», se félicite l’élu des Bouches-du-Rhône.
«La candidature d’Anne Hidalgo répond à des enjeux majeurs: la transformation sociale, la reconnaissance des “premiers de corvée” et la transition écologique», plaide François-Michel Lambert.
Dans une allusion à peine voilée au Président de la République, Anne Hidalgo a ainsi promis d’opposer son respect de l’autre au «mépris, à l’arrogance, à la condescendance de ceux qui connaissent si mal nos vies».

«Une personnalité parisienne, un peu hautaine et un peu dure»

Castaner, Blanquer, Mélenchon, Bardella, Pécresse… Hidalgo réussit à dresser tous les partis contre elle

Outre la transition écologique, dont elle assure qu’elle ne se fera pas «au détriment des classes moyennes et des catégories populaires», la candidate socialiste semble vouloir axer sa campagne sur la «décentralisation» du pays. Une gageure pour la maire de Paris, souvent dépeinte par ses contempteurs en «reine des bobos». «L’image qui revient souvent concernant Hidalgo, c’est celle d’une personnalité parisienne, un peu hautaine et un peu dure», fait remarquer à notre micro Jean-Daniel Lévy, directeur délégué de l’institut d’études Harris Interactive. «Anne Hidalgo a parfaitement conscience que la France, ce n’est pas Paris. Tout le monde connaît son parcours, elle n’est pas née parisienne», réplique François-Michel Lambert.

«Il y a forcément un paradoxe à vouloir incarner la France des territoires, mais elle cherche à aller là où elle est le plus en difficulté en essayant de récupérer un électorat qui est loin de lui être acquis», décrypte Jean-Daniel Lévy.
De fait, l’équipe de campagne d’Anne Hidalgo ne compte aucun membre issu de la mairie de Paris. L’«équipe de France des maires», issue du PS, compte ainsi Michaël Delafosse (maire de Montpellier), Nicolas Mayer-Rossignol (Rouen), Nathalie Appéré (Rennes), Mathieu Klein (Nancy) ou encore Carole Delga, facilement réélue à la tête de la région Occitanie en juin dernier. Selon les informations des Échos, Johanna Rolland, maire de Nantes et présidente de France urbaine, l’association des grandes villes et métropoles, devrait piloter sa campagne. «Elle a fait sa déclaration et maintenant, nous devons prendre le relais. Il ne peut y avoir d’homme ou de femme providentiels. Cette campagne sera une aventure collective», plaide-t-elle dans les colonnes du Monde.
«L’entourage proche d’Anne Hidalgo est une traduction de cette volonté de décentralisation», fait valoir François-Michel Lambert. «Anne Hidalgo a très bien compris que la force de la France, ce sont ses collectivités territoriales. Emmanuel Macron, de son côté, n’a autour de lui que des personnes qui fréquentent les mêmes cercles, les mêmes quartiers et les mêmes salons depuis des décennies», assène-t-il.
À défaut d’avoir un programme détaillé des mesures qu’elle entend appliquer, Anne Hidalgo, née en Espagne et issue d’une famille modeste, pourrait jouer sur la carte populaire afin de tenter de se démarquer d’Emmanuel Macron.
«Anne Hidalgo aura une toute autre approche de la responsabilité dévolue au Président de la République: c’est-à-dire non plus de manière verticale, mais en travaillant en équipe et en apaisant les fractures françaises», résume François-Michel Lambert.

L’impossible union de la gauche en 2022?

Reste que les divisions de la gauche pourraient coûter cher à l’élue socialiste dans sa course à l’Élysée. Après Nathalie Arthaud (Lutte ouvrière), Philippe Poutou (Nouveau Parti anticapitaliste), Fabien Roussel (Parti communiste français), Jean-Luc Mélenchon (La France insoumise), Arnaud Montebourg et un candidat écologiste dont l’identité reste à déterminer, Anne Hidalgo est la septième à gauche à se présenter sur la ligne de départ. Pis, selon le dernier baromètre IFOP, la maire de Paris (7%) est distancée par Yannick Jadot (8%) et Jean-Luc Mélenchon (9%).
«Ce sera difficile pour Anne Hidalgo de rallier toute la gauche. Il y a des désaccords de fond avec Jean-Luc Mélenchon. D’autre part, la primaire EELV a réussi à mobiliser plus de 100.000 personnes [122.670 exactement, ndlr]. Il serait étonnant que les écologistes reviennent sur leur décision de présenter un candidat», relève Jean-Daniel Lévy.
Difficile donc d’imaginer l’union sacrée à gauche dans les semaines à venir, même si François-Michel Lambert ne désespère pas totalement. «Nous devons réussir un “printemps de la France” comme nous avons réussi un “printemps marseillais” lors des dernières élections municipales». La coalition PS-EELV-LFI-PCF-DVG a alors permis de faire élire l’écologiste Michèle Rubirola. «Le risque si on échoue, c’est que la gauche ne soit pas en tête au premier tour, voire pas qualifié pour le second tour», explique-t-il. «Les élections régionales ont montré qu’un rassemblement de la gauche était possible», concède Jean-Daniel Lévy. 
Dans le camp d’Anne Hidalgo, la porte ne semble en tout cas pas totalement fermée. «J’irai rencontrer Fabien Roussel et le ou la gagnante de la primaire écolo pour proposer un rassemblement, mais je n’irai pas voir Mélenchon, qui ne veut pas d’union», indique ainsi Carole Delga dans les colonnes du Journal du dimanche. En 2017, Yannick Jadot s’était finalement rallié à la candidature de Benoît Hamon, vainqueur de la primaire socialiste. Le scénario peut-il se reproduire? «Tout dépendra du rapport de forces et du vainqueur de la primaire EELV», répond Jean-Daniel Lévy.
Selon une étude menée par Harris Interactive en juin dernier, la cote de confiance d’Anne Hidalgo auprès des sympathisants de gauche reste largement perfectible, puisque seuls 45% des électeurs de gauche accordent leur confiance à la maire de Paris. Un chiffre qui grimpe à 58% pour les sympathisants socialistes, mais chute à… 25% pour l’ensemble des Français. «Ce n’est pas beaucoup», glisse Jean-Daniel Lévy.
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