Alors que les tractations politiques se multiplient suite à la prise du pouvoir par les talibans* en Afghanistan, les vainqueurs tentent de rassurer sur leur future conduite des affaires. Les interrogations se succédant sur la condition des femmes, les talibans* ont notamment affirmé vouloir leur offrir une place dans les institutions politiques, rapporte Associated Press.
«L'Émirat islamique ne veut pas que les femmes soient des victimes. Elles devraient faire partie des structures gouvernementales conformément à la charia», a ainsi déclaré à l’agence de presse Enamullah Samangani, membre de la Commission culturelle des talibans*.
Les femmes pourraient plus largement être autorisées à travailler «où elles le souhaitent», dans le secteur privé ou le commerce, a confirmé à Bloomberg un responsable talibans* sous couvert d’anonymat.
Après l’entrée des talibans* dans Kaboul, plusieurs manifestations de femmes afghanes se sont d’ailleurs produites. Dans la capitale même, un rassemblement a eu lieu près du dixième district de police, selon l’agence Khaama Press. Les manifestantes ont demandé à ne pas être oubliées par le futur pouvoir, sans faire directement allusion aux talibans*.
En Iran, la diaspora afghane a également manifesté dans le ville de Qom pour les droits des femmes.
Entre optimisme et inquiétude
Ce n’est pas la première fois que les talibans* tempèrent leur discours sur la condition des femmes, malmenées lors de leur passage au pouvoir entre 1996 et 2001. Mi-juillet, Hibatullah Akhundzada, haut responsable de l’organisation, avait notamment assuré vouloir créer un «environnement approprié à l'éducation des filles», respectant néanmoins le cadre de la loi islamique.
Selon Moscou, ces concessions sur l’éducation semblent pour l’heure respectées. Les écoles pour filles fonctionnent encore à Kaboul et les élèves y sont accueillies normalement, a ainsi déclaré l’ambassadeur de Russie en Afghanistan.
Par ailleurs, la chaîne de télévision locale Tolo News continue de donner la parole à ses présentatrices, y compris pour interviewer des représentants talibans*.
Ce changement de ton du groupe islamiste a été salué par l’Onu avec un optimisme prudent. Au-delà des promesses, l’organisme attend des actes, a rappelé devant la presse Rupert Colville, porte-parole du Haut Commissaire aux droits de l'homme.
«Les talibans* ont fait un certain nombre de déclarations en apparence rassurantes […] De telles promesses devront être honorées, et pour le moment -encore une fois, c'est compréhensible, compte tenu de l'histoire passée- ces déclarations ont été accueillies avec un certain scepticisme», a-t-il souligné.
Dans une récente allocution, Emmanuel Macron a quant à lui fait part de ses inquiétudes, soulignant que les Afghanes avaient «le droit de vivre dans la liberté et la dignité» et mettant en garde le futur pouvoir contre l’«obscurantisme» et la «violence aveugle».
Les États-Unis ont quant à eux suspendu la reconnaissance d’un gouvernement des talibans* au respect du droit des femmes et au rejet du terrorisme, a déclaré Ned Prince, porte-parole du département d'État américain. Le haut responsable a également exhorté les nouveaux dirigeants à former un gouvernement inclusif comprenant des femmes.
Ce 15 août, l’avancée des talibans* sur Kaboul avait forcé le Président afghan, Ashraf Ghani, a quitté le pays, non sans emporter de quoi assurer ses arrières, selon Moscou. L’ambassade américaine a été évacuée, rappelant aux observateurs des scènes de la retraite de Saïgon en 1975. Des ressortissants étrangers et des Afghans souhaitant fuir le pays se sont rués vers l’aéroport de la capitale, où le chaos a régné pendant plusieurs heures.
Les talibans* ont par ailleurs décrété une amnistie générale pour les fonctionnaires d’État, ce 17 août.
*Organisation terroriste interdite en Russie
*Organisation terroriste interdite en Russie