David Cameron soupçonné de lobbying au profit d’une société spécialisée dans le séquençage de l’ADN humain

Soupçonné d’avoir fait pression sur le gouvernement pour promouvoir un contrat avec la société américaine Illumina, spécialisée dans le séquençage de l’ADN, l’ancien Premier ministre britannique David Cameron repousse toute accusation.
Sputnik
Un nouveau scandale lié au lobbying éclate au Royaume-Uni: l’ancien Premier ministre britannique David Cameron est soupçonné d’avoir favorisé la société Illumina, spécialisée en recherches génétiques -et qu’il conseille depuis 2018 de façon rémunérée. Après que Cameron a insisté dans un e-mail personnel pour que le ministre de la Santé à ce moment-là, Matt Hancock, assiste à une conférence sur le génome co-organisée par Illumina, l'entreprise américaine a décroché un contrat pour plusieurs millions de livres sterling, relatait le Times le 11 août.
«Je comprends que Jay [Flatley, président exécutif d'Illumina de l’époque, ndlr] a envoyé ceci directement à votre bureau, mais je voulais i) m'assurer que vous l'aviez vu personnellement; et ii) soutenir fermement leur invitation à cette conférence importante», a écrit M.Cameron au ministre de la Santé en 2019, révèle le quotidien britannique.
L’intervention de l’ancien numéro 1 du parti conservateur britannique semble avoir porté ses fruits, M.Hancock ayant bel et bien assisté à l'évènement en question. Une photo postée sur Twitter par David Cameron lui-même en septembre 2019 en témoigne.

Pour 123 millions de £

Une semaine seulement après la conférence en question, llumina avait décroché un contrat de 123 millions de livres sterling, soit plus de 145 millions d’euros, pour le séquençage génétique sans avoir de concurrents, rapporte le Times. L’accord a été conclu avec Genomics England, société détenue à 100 % par le département britannique de la Santé. L’objectif de celle-ci est de mener à bien le projet baptisé 100.000 génomes, visant à étudier l’ADN d'environ 85.000 patients du National Health Service (NHS) touchés par une maladie rare ou un cancer, précise le site de l'entreprise.
Il est pourtant à noter que la signature plusieurs jours après la conférence pourrait n’être qu’un hasard de calendrier. Cité par la BBC, le département de la Santé a expliqué que l'accord de 2019 était en fait un «contrat subséquent» à l’original conclu avec Illumina en 2014.
Qui plus est, est-il précisé, cette entente avait été réalisée de manière «transparente» et dans le cadre d’un «processus approprié», et Illumina était «la seule entreprise considérée comme ayant la capacité technique de livrer ce travail crucial».
En effet, selon les informations du site Web d’llumina, la société est reconnue comme leader mondial des solutions de séquençage de l’ADN et des micropuces à ADN dont la technologie «génère plus de 90 % des données de séquençage dans le monde».

Les codes du lobbying ont-ils été violés?

Contacté par la BBC, le porte-parole de l’ancien leader des conservateurs britanniques a nié toute accusation de lobbying au profit d’llumina.
«David Cameron n'a jamais fait pression sur le gouvernement au nom d'Illumina ni n'a été impliqué dans des discussions concernant un contrat ou des négociations commerciales», a-t-il déclaré.
Consistant à influer sur les décideurs politiques dans un but défini, souvent commercial ou lié à l’adoption de telle ou telle loi par les parlementaires, le lobbying en soi est autorisé au Royaume-Uni. Pourtant, les règles établies outre-Manche prévoient des limitations pour les anciens ministres.
«Après avoir quitté leurs fonctions, il sera interdit aux ministres de faire du lobbying auprès du gouvernement pour une période de deux ans», précise notamment un document officiel qui reprend le Code ministériel.
Vu que l’activité de Cameron a eu lieu en septembre 2019, donc presque trois ans après qu’il a quitté ses fonctions de Premier ministre, aucune règle n’a été violée.

Le scandale de Greensill Capital

Ce n’est d’ailleurs pas la première fois que David Cameron est accusé de lobbying. La faillite de la start-up financière britanno-australienne Greensill Capital, en mars 2021, a mis en exergue la pression que l’homme politique avait tenté d’exercer sur le gouvernement pour sauver cette entreprise pour laquelle il travaillait comme conseiller.
En 2020, M.Cameron a notamment essayé de persuader les ministres d'autoriser Greensill Capital à rejoindre la Corporate Covid Financing Facility (CCFF), rappelle la BBC. Intégrer ce programme, dont le but est d’aider des sociétés à survivre à la crise sanitaire, aurait permis à l'entreprise de réaliser des prêts assurés par le gouvernement.
Pour atteindre leur objectif, entre le 5 mars et le 26 juin 2020, Cameron et son équipe ont envoyé 45 e-mails, SMS et messages WhatsApp concernant Greensill, précise la chaîne de télévision. Cette fois-ci, l’opération lobbying de l’ancien locataire du 10, Downing Street n’a pas réussi.
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