La situation en outre-mer ne cesse de se dégrader. Face à ce constat, 35 médecins et scientifiques, originaires de Guyane, Martinique, Guadeloupe et de La Réunion ou travaillant sur place, ont publié une tribune appelant la population à se faire vacciner.
Les signataires, parmi lesquels se trouvent des épidémiologistes et des urgentistes, tentent de lever le doute sur les vaccins et «vaincre les contre-vérités scientifiques abondamment répandues» en fournissent des arguments, compte tenu de la «catastrophe sanitaire dans laquelle nous sommes».
Ils pointent un rebond spectaculaire des contaminations en Guadeloupe, Guyane, Martinique et à La Réunion et la saturation des services de réanimation. Ils avancent un argument fort: les habitants de ces territoires risquent fortement de développer des formes graves du Covid-19.
«Nos populations ont un risque majeur de développer des formes sévères de Covid-19, en raison des prévalences élevées de surpoids/obésité, diabète, hypertension artérielle, et aussi de l’existence d’une proportion importante de personnes âgées de plus de 60 ans», indiquent les médecins.
«Vaincre leurs peurs, la désinformation, les fake news»
Les signataires de la tribune décortiquent la thèse régulièrement exploitée par les réfractaires, à savoir, que les vaccins ont été développés trop rapidement. Les médecins affirment que tous les vaccins anti-Covid autorisés en France «ont suivi toutes les étapes scientifiques leur permettant d’être homologués par les Agences des médicaments nationales et internationales».
Cependant, les quatre vaccins homologués en France ne disposent pour l’instant que d’une autorisation de mise sur le marché conditionnelle (AMM) délivrée par le régulateur sanitaire européen, l’Agence européenne du médicament (EMA), en situation de pandémie et compte tenu des données manquantes. Toutefois, ce qui a été compressé, ce sont les phases administratives de mise en œuvre des essais cliniques, pas les phases d’éthique, précisent plusieurs experts, parmi lesquels Antoine Flahault, directeur de l'Institut de santé globale à la faculté de médecine de l'université de Genève, dans une interview à France24 début juillet.
Ensuite, les signataires mettent en valeur une efficacité «rarement obtenue avec d’autres vaccins» en particulier les vaccins à ARN messager (95% pour le Pfizer et 94% pour le Moderna selon l’Agence nationale de sécurité du médicament), ainsi que de «rarissimes effets secondaires graves non toxiques».
«Rappelons que la plupart des médicaments ont des effets secondaires», raisonnent-ils.
L’épidémie cible les personnes non vaccinées, martèlent-ils en espérant que leur appel permettra aux populations locales «de vaincre leurs peurs, la désinformation, les fake news».
Situation en outre-mer
La Guadeloupe a introduit le confinement à partir du 4 août. La Martinique l’a déjà imposé le 30 juillet, La Réunion depuis le 31 juillet.
Pour l’instant, le taux d’incidence le plus élevé est en Martinique (1.068 cas positifs au Covid pour 100.000 habitants au 2 août).
En Guadeloupe, cette proportion est de 828,6 pour 100.000 habitants au 3 août par rapport à un taux presque trois fois moindre la semaine dernière, selon la préfecture du département.
À La Réunion, le taux d’incidence au 3 août était de 353 pour 100.000 habitants.
En Guyane, il est de 206 sur 100.000 habitants à la même date.
Les disparités vaccinales
Alors que 63,6% de la population française ont reçu au moins une dose de vaccin, cette proportion tombe à 39% à La Réunion, 21,7% en Martinique, 21,4% en Guadeloupe et 21,3% en Guyane.
Pour Sébastien Lecornu, ministre des Outre-Mer, interrogé par la Libération le 1er août, à l’origine de ce faible taux de vaccination seraient les «réticences culturelles ou religieuses». Pour certains experts, l’une des principales explications à ce phénomène se trouverait dans le passé colonial de ces territoires.
«Dans la mesure où les Antilles sont d’anciens territoires colonisés, il y a une défiance très forte envers le gouvernement français. Refuser le vaccin revient à assumer une posture politique d’opposition, et à revendiquer une volonté de s’autogouverner», a estimé la sociologue Stéphanie Mulot auprès du Parisien le 30 juillet.
Les disparités vaccinales peuvent également être expliquées par des raisons logistiques: par exemple, à La Réunion la campagne vaccinale a débuté un mois après le lancement de la vaccination en métropole, les vaccins à ARN messager nécessitant le respect de la chaîne du froid.