Flambée des violences en France «malgré le battage médiatique de Darmanin»

Une augmentation «spectaculaire» des violences en France. C’est ce que révèlent les chiffres de la délinquance sur les six premiers mois de l’année 2021. Pour le criminologue Xavier Raufer, le manque de moyens alloués aux forces de l’ordre et le délabrement de la justice en France expliquent en partie cette flambée.
Sputnik
«On rabiote sur la sécurité depuis des années, les criminels en profitent bien évidemment», cingle le criminologue Xavier Raufer à notre micro.

Les derniers chiffres de la délinquance, révélés par Le Figaro ce jeudi 29 juillet, laissent en effet peu de place au doute. Le nombre d’agressions et d’homicides recensés de janvier à juin montre une progression spectaculaire des violences en France.

Les atteintes à l’intégrité physique (coups et blessures volontaires) n’ont jamais été aussi nombreuses: 350.000 agressions ont été constatées en un semestre, soit une augmentation de 16% par rapport à 2020. Pour Xavier Raufer, l’année 2020, marquée par deux mois de confinement strict entre mars et mai, n’a toutefois pas beaucoup de valeur statistique. «Il est impossible d’évaluer la criminalité de voie publique alors que les Français sont restés confinés deux mois entiers», relativise l’auteur de Le Crime mondialisé (Éd. du Cerf).

Par rapport à la même période en 2019, les violences sur les personnes ont toutefois augmenté de 10%, alors que le premier semestre 2019 était marqué par le mouvement des Gilets jaunes. «L’activité réelle des criminels ne baisse pas du tout malgré le battage médiatique de Gérald Darmanin», constate Xavier Raufer.

Les campagnes de plus en plus touchées par les violences

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Ce bilan pour la France révèle aussi une aggravation sensible de la criminalité dans les zones périurbaines et rurales. Des territoires particulièrement touchés et qui accusent les plus fortes hausses d’infractions caractéristiques des violences. Plus de 110.000 actes délictuels ont été répertoriés sur les six premiers mois de 2021, contre 100.000 au premier semestre 2020 et un peu plus de 90.000 en 2019. Des chiffres inquiétants, mais peu surprenants au regard du «manque de moyens alloués aux services de gendarmerie», estime Xavier Raufer:

«La campagne est non seulement victime d’actes de violence, mais aussi d’actes de pillage. Depuis plusieurs années, des bandes de nomades criminalisés, entre autres, volent le petit bétail (moutons, chèvres, poules), des récoltes ou encore le fioul des tracteurs. Tout cela est de moins en moins réprimé», juge le criminologue.

Déjà en janvier dernier, le bilan annuel du ministère de l’Intérieur constatait une progression des violences de 8% dans les régions rurales et périurbaines (dites aussi «zones gendarmerie») en 2020, toutes catégories confondues. Dans le détail, l’augmentation des atteintes volontaires à l’intégrité physique des personnes culmine à 61% dans la Meuse, 57% dans le Calvados, mais aussi dans le Maine-et-Loire, dans la Saône-et-Loire ou encore dans la Vienne.

In fine, la carte de France des violences laisse apparaître des disparités assez fortes entre les différentes régions du territoire avec des départements particulièrement touchés (les cinq départements ultramarins, la Seine-Saint-Denis, Paris, les Bouches-du-Rhône, le Nord-Pas-de-Calais, notamment), et d’autres régions plus épargnées (Bretagne, Sud-Ouest). «Il y a des endroits très criminalisés avec des cités ou des zones hors contrôle, c’est-à-dire la périphérie des grandes métropoles. Pour le reste, certains départements ruraux sont très frappés par une criminalité itinérante qui devient exaspérante pour la population», analyse Xavier Raufer.

Règlements de compte entre bandes plus courants

Le dernier point particulièrement préoccupant sur l’état de la sécurité en France concerne la hausse tendancielle des homicides et tentatives d’homicide. Déjà plus de 2.200 faits ont été enregistrés en l’espace de six mois, zones police et gendarmerie confondues, soit une augmentation de 12% par rapport à 2019. Pire, les actes suivis du décès de la victime ont grimpé de 7%, avec plus de 600 morts entre le 1er janvier et le 30 juin 2021. Pour Xavier Raufer, ces actes de violences suprêmes sont essentiellement dus aux «règlements de compte entre malfaiteurs», de plus en plus fréquents entre bandes rivales selon lui.

«À partir du moment où on laisse les mains libres aux voyous dans certains quartiers, ils s’y répandent et y accomplissent des actes criminels, principalement du trafic de stupéfiants. Quand des bandes se contestent le pouvoir, elles s’entretuent.»

Une illustration de l’«ensauvagement d’une partie de la société», dénoncé par Gérald Darmanin il y a tout juste un an? «Quand il est arrivé au ministère de l’Intérieur, Gérald Darmanin n’avait deux ans pour faire bouger les choses avant la présidentielle. Ce serait surhumain de réussir à améliorer la situation en si peu de temps», rétorque Xavier Raufer.

De fait, pour le criminologue, «le manque de moyens attribués au régalien de manière générale» ne laisse pas augurer une amélioration de la situation dans les années à venir. «La justice en France est limite clochardisée et n’a pas du tout les moyens de fonctionner correctement, ce qui fait que les bandits ont hélas trop souvent les mains libres», tance notre interlocuteur.  

«L’État nation a été inventé pour permettre aux citoyens de jouir de quelque chose de très simple. Raymond Aron a résumé cela en une phrase: “Respecté à l’extérieur, en paix à l’intérieur.” Voilà le rôle de l’État nation. Le moins que l’on puisse dire, c’est que ce n’est pas très glorieux dans ce domaine depuis quelques années», conclut Xavier Raufer.
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