«Incroyable et odieux. L'ambassade de Cuba attaquée au cocktail Molotov en plein Paris au petit matin. Effet direct des campagnes absurdes de haine et de boycott meurtrier par les USA.» Jean-Luc Mélenchon a apporté son soutien à la mission diplomatique de Cuba dans le XVe arrondissement de Paris, cible de deux engins incendiaires lancés dans la soirée de ce lundi. Par chance, aucun membre du personnel n’a été blessé. Mais les pompiers ont constaté des dégâts mineurs à leur arrivée sur les lieux.
Le patron de La France insoumise va plus loin. Il dénonce la responsabilité des États-Unis. Jean-Luc Mélenchon relaie ainsi les accusations du ministre cubain des Affaires étrangères Bruno Rodríguez Parrilla. Sur Twitter, ce dernier tient ainsi «le gouvernement américain pour responsable de ces campagnes incessantes» contre l’île, qui «encouragent ces comportements et des appels à la violence, en toute impunité, depuis son territoire».
Une campagne d’influence américaine
À l’instar de son confrère au Palais-Bourbon, le député PCF André Chassaigne condamne au micro de Sputnik ce qu’il qualifie d’«acte terroriste». Remonté contre Washington, il considère cet événement comme «le prolongement des rassemblements initiés par les États-Unis».
«C’est la nouvelle expression d’une guerre qui ne dit pas son nom. Une guerre que conduisent les États-Unis contre leur voisin cubain depuis la révolution. […] Le blocus est une guerre économique pour déstabiliser Cuba et aujourd’hui cette guerre prend des dimensions inédites. Les Américains créent une situation de pénurie par le blocus et ensuite, sur les réseaux sociaux, ils appellent la population cubaine à se révolter.»
«Depuis le début de la pandémie, les États-Unis ont adopté près de cinquante mesures destinées à étouffer l’économie cubaine, qui subit déjà dans sa chair les graves conséquences de la crise due au Covid-19. Washington souhaite tirer profit de la crise sanitaire mondiale pour faire avancer son agenda politique hostile vis-à-vis de Cuba.»
Des «groupuscules violents d’extrême droite»
Et ces appels ont dû trouver leurs cibles! Les posts sur les réseaux sociaux ont été suivis d’actes. Si le jet d’explosifs contre l’ambassade de Cuba à Paris n’a pas été encore revendiqué, le chercheur ne voit qu’une «infime minorité d’extrémistes» pouvant se révéler violents. Il impute l’attaque à des «groupuscules d’extrême droite opposés au gouvernement de La Havane». Mais «l’immense majorité de la communauté cubaine» à Paris est «pacifique et opposée» aux sanctions américaines, soutient l’universitaire. Ainsi le 24 juillet, la mission diplomatique cubaine organisait sur le Champ-de-Mars, à Paris, une manifestation rejetant l’embargo américain.
Pourtant, les attaques du genre de celle de Paris, qualifiée de «terroriste» par La Havane, ne sont pas si rares partout dans le monde, rappelle Salim Lamrani. Déjà en mai 2020, l’ambassade cubaine à Washington était criblée de balles par un opposant, ne causant là aussi que des dégâts matériels. Plus d’un an après l’attentat, les États-Unis «n’ont toujours pas condamné de façon officielle l’attaque survenue sur leur territoire», indique notre interlocuteur. Pis, le lendemain de cette fusillade, le département d’État annonçait l’ajout de Cuba à une liste noire de pays qui ne coopèrent pas assez selon eux en matière de contre-terrorisme. Le spécialiste des relations entre Cuba et les États-Unis remonte à plus loin. Il rappelle que l’île caribéenne est victime de terrorisme depuis 1959, année de la révolution. Deux diplomates cubains ont même été assassinés au Portugal en 1976. Un meurtre suivi la même année d’une vague d’attentats à la bombe frappant les représentations cubaines au Pérou, au Mexique et même à New York.
Quant à lui, le député André Chassaigne appelle la diplomatie française à condamner fermement cette campagne et ces actes de violence. C’est chose faite… à moitié! La France «condamne l’attaque» a indiqué le Quai d’Orsay, annonçant aussi le renforcement du dispositif de sécurité autour de l’ambassade. Le parquet de Paris a ouvert une enquête en flagrance du chef de «dégradations par substance explosive ou engin incendiaire». Mais l’élu va plus loin. Il demande au gouvernement français de s’opposer à «l’extraterritorialité illégale de l’embargo américain» et de «condamner le comportement inacceptable des États-Unis». Le parlementaire communiste aura bien du mal à se faire entendre.