Archives secret-défense: les sénateurs PS dénoncent «un énorme retour en arrière»

Les sénateurs PS ont dénoncé mercredi «un énorme retour en arrière» et «un passage en force» après le vote dans la nuit, dans le cadre du projet de loi renforçant les mesures antiterroristes et le renseignement, d'un article réformant l'accès aux archives classifiées de plus de 50 ans.
Sputnik

«Je suis très en colère de voir qu'on puisse revenir de façon aussi brutale, et au détour d'un cavalier législatif, sur la loi de 2008, c'est extrêmement grave par rapport à l'écriture de l'histoire contemporaine et politique de demain», a déclaré la porte-parole Sylvie Robert lors du point de presse du groupe.

«Alors qu'on sait qu'il y a une décision du Conseil d'État qui va tomber, c'est un passage en force», a renchéri son collègue Rachid Temal.

«C'est une vraie tache dans le mandat d'Emmanuel Macron», a-t-il insisté. «Le Président a souhaité faire un travail sur la mémoire, que ce soit la mémoire de la Première Guerre mondiale, sur l'histoire commune de la France et de l'Algérie, et derrière ça on ferme les archives», a-t-il poursuivi.

Article 19 du projet de loi

Au cœur de la polémique, l'article 19 du projet de loi renforçant les mesures antiterroristes et le renseignement, voté nuitamment en première lecture par le Sénat.

Une loi de 2008 prévoit que les archives de plus de 50 ans soient librement accessibles. Mais l'application très stricte d'une procédure administrative de 2011 impose de déclassifier, un par un, tous les documents tamponnés comme «secrets», entravant de fait leur consultation.

Avec l'article 19, «l'absence d'un tampon de déclassification ne sera plus un obstacle», a affirmé la ministre de la Défense Florence Parly.

Mais en contrepartie, il introduit pour les documents les plus sensibles des exceptions au délai de 50 ans. «Ils ne seront accessibles que selon le bon vouloir du pouvoir exécutif et pourront être perpétuellement interdits d'accès», affirme Jean-Pierre Sueur.

La centriste Catherine Morin-Desailly a dénoncé «un recul historique dans le principe de libre communicabilité des archives». «Cet article a suscité la colère et l'émoi de la communauté scientifique et culturelle», a souligné Pierre Laurent (CRCE à majorité communiste). «Que fait cet article dans ce texte?», a interrogé l'écologiste Esther Benbassa, chercheuse et historienne.

Plusieurs associations et historiens avaient déposé à l'automne un recours au Conseil d'État demandant l'abrogation de la restriction administrative de 2011. Sa décision est attendue dans les prochains jours.

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