«Ils l’auront». Ce mardi 29 juin, Olivier Véran s’est voulu ferme et déterminé. Sur France Info, le ministre de la Santé et des Solidarités a assuré que les médecins généralistes auraient accès à la liste de leurs patients vaccinés ou non contre le Covid-19. Selon Marianne, cette demande a été faite par des médecins généralistes eux-mêmes auprès de l’Assurance maladie. «Je demande à la CNIL de me laisser la possibilité d’envoyer aux médecins généralistes la liste de leurs patients qui ont été vaccinés, de manière à ce qu’ils puissent mobiliser ceux qui ne l’ont pas été», a précisé M. Véran.
La Commission Nationale de l’Informatique et des Libertés (CNIL) devra se prononcer ce jeudi 1er juillet sur la question, avant un éventuel passage par le Conseil d’État.
«Cela permettra de se rapprocher des patients qui nous échappent, car nous n’avons pas les retours des vaccinodromes ou des autres généralistes qui vaccinent», approuve le Dr Jérôme Marty au micro de Sputnik.
Pour le président de l’Union française pour une médecine libre (UFLM), un syndicat professionnel de médecins généralistes, «c’est le rôle des généralistes que d’essayer de convaincre leurs patients d’aller se faire vacciner.» «Le doute est inhérent au vaccin lui-même, c’est la raison pour laquelle il est important que les médecins en discutent avec les patients», plaide Jérôme Marty, lui-même médecin généraliste à Fronton, en Haute-Garonne.
Violation du secret médical?
Dans «Vaccin Covid», on trouve les informations d’identité, de coordonnées, le numéro de sécurité sociale, les comorbidités et les dates et lieux de première et deuxième injections pour ceux qui se sont fait vacciner. Autant de données que les médecins traitants possèdent déjà pour leurs propres patients, puisqu’elles font partie de leurs dossiers médicaux. Pour Jérôme Marty, cela ne poserait donc pas de problème de trahison du secret médical:
«Le secret médical, c’est un coffre dont le médecin a la charge et le patient a la clé. Ce n’est donc pas enfreindre le secret médical que de savoir qui, de ses propres patients, a été vacciné ou non», argue-t-il.
Dans son avis sur «Vaccin Covid» donné le 30 décembre 2020, la CNIL rappelle que «ces données sont protégées par le secret médical et ne doivent être traitées que par des personnes habilitées et soumises au secret professionnel.» En l’occurrence, la diffusion de la liste des personnes vaccinées aux généralistes outrepasserait l’impératif édicté par la CNIL selon lequel le «consentement» de la personne vaccinée est requis pour la transmission des données médicales.
«Des escrocs notoires et des manipulateurs qui font du fric sur le dos de la crise»
Cette requête des médecins généralistes intervient alors que la campagne de vaccination montre les premiers signes d’essoufflement en France. Plus inquiétante, la menace du variant Delta, qui représente aujourd’hui «20% des nouveaux diagnostics» de Covid-19 selon Olivier Véran (soit 463 cas sur les 2.314 tests positifs remontés le 29/6 par Santé publique France), se fait de plus en plus pressante. «Le taux de vaccination monte encore, mais pas suffisamment vite», a prévenu le ministre de la Santé.
Le gouvernement vise 40 millions de primo-vaccinés d’ici à la fin de l’été. 33,5 millions de Français ont à ce jour reçu au moins une dose de vaccin. Un ralentissement de la vaccination qui n’a pas échappé à Jérôme Marty, très remonté contre «les médecins qui prônent la non-vaccination», «heureusement extrêmement minoritaires» selon lui:
«On a des escrocs notoires et des manipulateurs qui font du fric sur le dos de la crise et qui essaient de dynamiter la campagne de vaccination. Je n’ai pas de mots assez durs pour les qualifier. Ceux-là, on ira les traduire en justice et on s’occupera d’eux. Aucun n’échappera aux mailles du filet, il faut le savoir. C’est à la fin du bal qu’on paie les musiciens», menace le président de l’UFLM.
Dans le viseur du médecin généraliste, «Fabrice Di Vizio» (avocat en droit de la santé publique), «Martine Wonner» (ex-députée LREM et médecin-psychiatre) ou encore «Alberto Brusa», avocat investi dans la lutte contre la «dictature sanitaire».
«Je suis fou furieux contre ces gens, qui pactisent et collaborent avec le virus, ni plus ni moins», accuse Jérôme Marty.
Quoiqu’il en soit, rien ne dit que les 80% de vaccinés à l’échelle de la population nationale, le fameux seuil censé permettre l’immunité collective, puisse être atteint dans les semaines ou les mois qui viennent. Ce que reconnaît d’ailleurs Jérôme Marty. «Tous les pays connaissent une forme de plafond de verre. Certaines personnes ont été oubliées de la campagne vaccinale à cause de leur précarité. On a oublié les gens qui sont dans des déserts numériques, les personnes dépendantes, seules, âgées, etc.». La solution selon lui?
«La campagne doit aller du vaccin vers le patient désormais. Il faut envoyer des équipes médicales, des bus vaccinaux et des libéraux qui vont vacciner chez les patients.»