Pourquoi le variant Delta progresse-t-il dans le monde face à des populations vaccinées?

Le variant Delta se répand comme une traînée de poudre un peu partout sur la planète. Sur le territoire français, il pourrait devenir majoritaire dans les prochains mois, bien que 50% de la population ait déjà reçu sa première dose de vaccin. De quoi remettre en cause la stratégie vaccinale?
Sputnik

Le variant Delta poursuit sa course à travers le monde. Épargnée jusqu’ici, la France pourrait selon les autorités sanitaires voir le variant représenter 80% des nouveaux cas de Covid d’ici la fin de l’été. Invité de la matinale de France Info ce mardi 29 juin, le ministre de la Santé, tout en rappelant que «le taux d’incidence, la circulation du virus, continue de baisser dans notre pays», a appelé à «rester vigilant».

«Le variant Delta représente environ 20% des nouveaux diagnostics. Il continue de monter en pourcentage, pas en valeur absolue, mais il devient progressivement dominant, ce qu’il fait d’ailleurs dans tous les pays du monde, puisqu’il est plus contagieux», expliquait Olivier Véran.

Partie de l’État du Maharashtra, au centre de l’Inde, où elle a été découverte en octobre 2020, cette nouvelle souche plus contagieuse du virus SARS-CoV-2 est aujourd’hui présente dans au moins 85 pays, selon l’OMS. Au Portugal comme en Russie, le variant a contraint les autorités à prendre de nouvelles mesures de restrictions sanitaires. Moscou et Saint-Pétersbourg enregistrent cette semaine de nouveaux records de décès quotidiens en lien avec le Covid-19, avec 144 morts en 24h recensés dimanche 27 juin. À l’heure où les pays entendent refermer le chapitre de la crise sanitaire grâce au recours de la vaccination, la résistance du variant Delta bouscule le calendrier de sortie de crise, comme en Grande-Bretagne ou en Israël.

Variant delta, peu de formes graves

La semaine du 21 juin, Israël enregistrait ainsi une hausse de nouveaux cas Covid, qualifiée par le Premier ministre Naftali Bennett de «nouvelle vague». 40% des nouveaux cas étaient des personnes déjà vaccinées, dans un pays où la couverture vaccinale est la plus élevée du monde. Même inquiétude du côté de la Grande-Bretagne, où le variant, devenu majoritaire, continuait sa diffusion dans une population totalement vaccinée à 60%.

La revue médicale The Lancet publiait début juin une étude réalisée par les autorités britanniques, révélant que la réponse immunitaire après une seule dose de vaccin Pfizer/BioNTech chutait à 32% pour le variant Delta. Un chiffre qui affleure néanmoins les 90% avec l’injection de deux doses.

«La situation est alarmante»: l’OMS alerte contre la propagation du variant Delta Plus
Ce que montrent les différentes études, c’est néanmoins que la vaccination à deux doses offrirait une certaine efficacité face aux formes graves liées au variant Delta. «Toutes les études montrent que, si vous êtes vacciné puis contaminé, vous ne faites pas de formes graves», assurait Olivier Véran ce mardi 29 juin sur France Info. Après deux doses, le vaccin Pfizer-BioNTech s’avèrerait en effet efficace à 96% contre les risques d’hospitalisation liés au variant Delta, contre 92% pour l’AstraZeneca, d’après une étude à l’état de prépublication de Public Health England. Ce que démontrerait la hausse du nombre de cas contaminés par le variant Delta en Angleterre, où le nombre de nouveaux décès reste encore très faible.

«Il est plus contagieux, mais ce n’est pas un variant tueur. Lorsqu’on regarde les chiffres d’hospitalisations, notamment en Angleterre, c’est plutôt rassurant. Il prend la place des autres variants, mais globalement, il n’est pas plus dangereux ou plus létal comme cela a été supputé au début», soulignait sur le plateau de TF1 lundi 28 juin, Gérald Kierzek, médecin urgentiste à l’hôpital Hôtel-Dieu (AP-HP) à Paris.

Si les études scientifiques au sujet de l’efficacité des vaccins sur le variant Delta sont rassurantes concernant les vaccins Pfizer et AstraZeneca, elles restent néanmoins encore indisponibles pour Moderna et Janssen. En France, 89% des primovaccinés le sont au Pfizer ou à l’AstraZeneca. Même si la plupart des Français, plus prompts à avoir recours au Moderna ou au Jansen, sont réticents aujourd’hui à l’idée de recevoir leur deuxième dose d’AstraZeneca. 

Une couverture vaccinale insuffisante

Le 1er mai, le variant Delta ne représentait que 0,1% des nouveaux cas Covid en France. Deux mois plus tard, il avoisine les 20%. Dès le mardi 22 juin, Dominique Costagliola, épidémiologiste et directrice de recherche à l’INSERM, déclarait sur France Info qu’à l’exemple du variant anglais devenu majoritaire, «cela paraît très probable» qu’il en soit bientôt de même en France pour le variant indien.

Le délai imposé entre deux doses de vaccins Pfizer et Moderna pourrait en effet lui permettre de se propager plus rapidement. C’est la raison pour laquelle le gouvernement a décidé de passer de 35 à 21 jours le délai pour recevoir la seconde dose afin de renforcer l’immunité des vaccinés.

«Le variant indien va prendre le dessus, c’est clair, comme il l’a fait en Grande-Bretagne. À nombre de particules égales, la probabilité d’être contaminée augmente parce que le virus est plus à même de se fixer sur la surface de nos cellules. Il est plus teigneux», confiait ce vendredi 25 juin Alain Fischer, le «Monsieur vaccin» du gouvernement.

Reste que le rythme de vaccination ralentit en France. Parmi les 400.000 vaccinés par jour, 200.000 reçoivent quotidiennement leur première piqure. En cause, la défiance d’une irréductible partie des Français envers les effets secondaires du vaccin et une baisse de la motivation due à l’amélioration de la situation sanitaire dans le pays. Près d’un Français sur deux a donc reçu sa première dose.

La crainte est grande au sein du gouvernement que la couverture vaccinale atteigne un plafond de verre et entraîne un nouveau pic d’hospitalisations à l’automne. Ce que confirmait une nouvelle modélisation publiée lundi 28 juin par l’Institut Pasteur. «Le taux de vaccination monte encore, mais pas suffisamment vite», reconnaissait le ministre de la Santé sur France Info ce mardi. D’où l’évocation par Olivier Véran de rendre la vaccination obligatoire pour les soignants dans un futur proche.

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