Au Cameroun, un collectif constitué de vingt femmes camerounaises vient de solliciter le Conseil de sécurité des Nations unies pour aider à mettre fin aux conflits qui traversent le pays. L'institution onusienne y est invitée à alterner bons offices et moyens de pression.
«Nous vous écrivons donc aujourd'hui, car malgré la gravité de la situation, le Conseil de Sécurité des Nations Unies n'a toujours pas officiellement inscrit le Cameroun à son ordre du jour et encore moins discuté et analysé cette situation afin de prendre des mesures efficaces pour mettre fin aux souffrances du peuple camerounais», est-il possible de lire dans ce courrier que Sputnik a consulté.
Les foyers de tension qui sont principalement visés dans ce plaidoyer se trouvent dans l'Extrême-Nord qui est en proie au terrorisme de Boko Haram; dans le Nord-Ouest et le Sud-Ouest terrassés par la crise séparatiste; dans l’Est et dans la région de l’Adamaoua où s'activent des groupes armés, sans compter la piraterie dans le golfe de Guinée.
Ces conflits ont causé la mort d’au moins 10.000 personnes depuis 2012, un million de déplacés internes et 60.000 réfugiés, rappellent les auteurs de la lettre. Venues d'horizons divers (on y trouve notamment l'avocate Alice Nkom connue pour son combat en faveur des droits humains; Tomaïno Ndam Njoya, maire de la commune de Foumban, dans l’ouest du pays; ÉEdith Kah Walla, présidente du parti d'opposition Cameroon People’s party, etc.), ces personnalités exhortent l’Onu à prendre plus au sérieux la situation du Cameroun.
S'exprimant sur les motivations de cette initiative, l'avocate Alice Nkom explique à Sputnik: «Le crime que l’on pourrait nous reprocher c’est de ne rien faire face à ces atrocités. C’est notre devoir le plus élémentaire, en tant que femmes, de faire entendre nos voix, car il y va de l’intérêt de nos enfants, de notre pays et des générations futures», précise-t-elle au micro de Sputnik.
Des mesures de sortie des crises
Autrefois havre de paix, le Cameroun est depuis plusieurs années l’épicentre de crises protéiformes dans une région, l'Afrique centrale, elle-même en proie à l’instabilité.
Outre le conflit séparatiste en cours depuis 2016 dans les régions anglophones, le pays fait face aux attaques répétées de Boko Haram dans sa partie septentrionale. Des crises auxquelles sont venues se rajouter des tensions sociopolitiques nées de la présidentielle d’octobre 2018 qui avait vu l’arrestation et l’emprisonnement de nombreux militants de l’opposition dont certains sont encore en détention.
«Qu’il y ait une déclaration publique des Nations Unies exigeant que le Gouvernement du Cameroun, qui nous y représente en tant qu'État membre, mette en œuvre de véritables solutions en faveur du retour à la paix et à la sécurité au Cameroun», poursuivent les signataires de la lettre.
Pour quelle efficacité?
Listant les préalables à un retour de la stabilité dans les régions anglophones du pays, entre autres «négocier un cessez-le-feu avec les groupes armés», ces femmes mettent en garde contre les possibles conséquences de l’indifférence dont fait montre la communauté internationale. Pour ces militantes, l’idéal serait d’agir maintenant pendant qu’il en est encore temps.
«Nous ne souhaitons pas être l’objet de la prochaine mission de maintien de la paix. Nous ne souhaitons pas accueillir des Casques bleus. En prenant quelques mesures simples aujourd’hui, le monde entier peut éviter cela», préviennent-elles.
Alors que de nombreuses solutions explorées dans la résolution des crises au Cameroun, notamment le conflit séparatiste, se sont révélées inefficaces jusqu’ici, le plaidoyer des femmes peut-il déboucher sur la victoire de la paix dans le pays? Édith Kah Walla, leader politique et l’une des signataires de cette lettre ouverte, l’assure: «Nous avons pris toutes les mesures de notre côté, pour que notre démarche soit aussi efficace que possible».
Abondant dans le même sens, l'avocate Alice NKom souligne la nécessité d’aller jusqu’au bout de la démarche. Pour elle, «l’Onu devrait mettre suffisamment de pression sur le pouvoir de Yaoundé pour trouver des solutions à la crise politique dans les régions anglophones du pays».