Union européenne: 14,2 milliards d’euros pour aider les candidats à l’adhésion

Le 2 juin 2021, les institutions européennes ont annoncé un plan d’aide de 14,2 milliards d’euros pour les Balkans et la Turquie afin de les accompagner dans leur processus d’adhésion.
Sputnik

Les institutions européennes ont annoncé mercredi 2 juin avoir trouvé un accord sur un plan d’aide de 14,2 milliards d’euros à destination de la Turquie et des Balkans afin les accompagner en vue de leur adhésion future à l’Union européenne. Cet accord doit désormais être traduit en textes juridiques et approuvé par le Parlement et le Conseil européen. Selon le communiqué de presse de la Commission européenne, cet accord devrait être entériné à l’automne. Les bénéficiaires se nomment l’Albanie, la Bosnie-Herzégovine, la Macédoine du Nord, le Kosovo, le Monténégro, la Serbie et la Turquie. Cet accord porte sur la période 2021-2027 avec effet rétroactif au 1er janvier 2021.

Le commissaire en charge de la politique de voisinage et de l’élargissement Olivér Vàrhelyi se félicite de cet accord trouvé avec les pays en question. «Cet accord tant attendu sur notre ambitieuse aide financière est un signal positif, bienvenu et fort pour les Balkans occidentaux et la Turquie […]. Il permettra de financer le plan économique et d'investissements pour les Balkans occidentaux, un outil essentiel pour soutenir la reprise économique de cette région prioritaire.»

En quoi consistent concrètement ces accords européens?

Ces accords intitulés «Instruments d’assistance à la pré-adhésion» ou «IPA III» sont des aides destinées aux pays candidats à l’adhésion pour mettre en place des réformes économiques, sociales, administratives, juridiques, institutionnelles et politiques afin de se mettre en conformité avec les exigences de l’Union européenne. Ces accords prévoient une meilleure répartition des fonds alloués aux pays candidats en modulant l’assistance. Cependant, le communiqué de presse ne précise pas dans quelle mesure cette assistance modulée se mettra en œuvre. Il convient de rappeler que le processus d’adhésion à l’Union européenne est long et semé d’embûches. En effet, les pays concernés ont déposé leur demande d’adhésion en 1999 pour la Turquie, 2005 pour la Macédoine du Nord, 2010 pour le Monténégro, 2012 pour la Serbie et 2014 pour l’Albanie.

Les modalités d’application seront-elles suivies par les États candidats?

L’adhésion à l’Union européenne prévoit de se conformer à l’article 49 du traité sur l’Union européenne, régi par les critères de Copenhague définis en 1993 puis élargis en 2006 qui reposent sur quatre points: le critère politique, le critère économique, les acquis communautaires et enfin la capacité d’intégration.  Sur ce volet, cela semble compromis sur le papier. En effet, il semble improbable de voir la Serbie renier le frère russe en acceptant les sanctions contre Moscou mais aussi renoncer au Kosovo afin d’entrer dans l’Union européenne. Tout comme la Turquie avec laquelle les négociations d’adhésion sont au point mort depuis 2019, il est improbable de voir Erdogan se plier aux exigences européennes en vue d’une adhésion. Quant à l’Albanie et la Macédoine du Nord, plusieurs pays avec qui la France a refusé d’ouvrir les négociations à l’adhésion à l’Union européenne en 2019.

Une situation intérieure compliquée

La situation intérieure de l’Union européenne n’est guère réjouissante. Fragilisée par le Brexit, l’Union européenne assiste impuissante depuis plusieurs années à la montée en puissance du populisme et la crise sanitaire du Covid-19 a mis en lumière l’incapacité de Bruxelles à protéger ses frontières, situation qui s’était déjà manifestée dès 2015 avec la crise migratoire. L’autre sujet de crispation pour les populations européennes est le phénomène des délocalisations au sein des pays membres de l’UE, phénomène accentué avec le recours aux travailleurs détachés, ce dernier sujet ayant été un sujet de friction entre Paris et Varsovie en 2017. Le plan de relance post-Covid voté en 2020, non sans difficulté, n’arrangera rien puisqu’on se souvient du veto opposé par la Pologne et la Hongrie qui s’opposaient au conditionnement du versement des fonds au respect de l’État de droit. Le ministre de la Justice polonais Zbigniew Zobro avait alors qualifié ce conditionnement «d’asservissement institutionnel, politique, d’une limitation radicale de la souveraineté». Côté français, les dernières recommandations européennes à la demande de Berlin ordonnant le démantèlement d’EDF sonnent comme une énième punition alors que la France fait constamment des efforts depuis de nombreuses années.

Pour l’Europe, ces accords de pré-adhésion sont une avancée diplomatique sur le papier seulement puisqu’ils permettent de montrer la bonne forme de l’UE en concentrant son travail sur l’éternelle question de l’élargissement de l’Union européenne. Le but de Bruxelles est clair puisqu’en avançant sur ce dossier, il veut faire oublier les dissensions internes alors qu’il convient de se poser la question sur l’intérêt financier d’investir des milliards dans des pays encore bien loin du chemin de l’adhésion.

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