Une église serbe construite sur le terrain d’une Bosniaque démolie – vidéo

Un différend juridique de plusieurs décennies a abouti à la démolition par les autorités d’une église orthodoxe serbe érigée sur le terrain d'une Bosniaque, en république serbe de Bosnie. La construction avait été jugée illégale.
Sputnik

Les autorités de la république serbe de Bosnie ont démoli, le 5 juin, une église orthodoxe serbe construite sur un terrain appartenant à une Bosniaque près de Srebrenica, relate Associated Press. La décision a été prise par un tribunal après une bataille juridique de 20 ans plongeant ses racines dans la guerre de Bosnie de 1992-1995. L'affaire avait atteint la Cour européenne des droits de l'homme.

Une grue a été utilisée pour retirer d’abord la croix au sommet de l'église, puis la tour a été partiellement détruite pour en extraire la cloche. Une pelle rétrocaveuse a ensuite progressivement réduit le bâtiment en miettes.

La Cour européenne des droits de l'Homme a statué en octobre 2019 que les autorités de la République serbe de Bosnie devaient raser l'église et payer des dommages et intérêts à la famille de la plaignante pour un montant total de 31.000 euros.

Elle ne tolère pas d’église sur son terrain

L'église a été construite en 1998, deux ans avant le retour dans son village de cette femme, dont la famille avait été expulsée pendant la guerre, avec d'autres résidents musulmans du village de Konjevic Polje. La famille, composée de Bosniaques, est musulmane, et le village a été pris par des Serbes de Bosnie, qui sont majoritairement des chrétiens orthodoxes.

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L’époux de cette femme a été tué lors du massacre de Srebrenica, en juillet 1995, perpétré par des unités de l'armée de la république serbe de Bosnie sous le commandement du général Ratko Mladic. Le massacre de Srebrenica a été reconnu internationalement comme le seul génocide européen depuis la Seconde Guerre mondiale. Selon la version universellement admise, près de 8.000 personnes y ont été tuées.

Cependant, des observateurs, dont l’économiste américain Edward S. Herman, doutent de ces chiffres. Selon ce dernier, «le "massacre de Srebrenica" est le plus grand triomphe de la propagande». Dans un article sur ce thème, il écrivait que «les nombreux corps trouvés dans des tombes locales ont été victimes de combats, et de nombreux hommes musulmans de Bosnie qui ont fui Srebrenica ont atteint le territoire musulman de Bosnie en toute sécurité. Certains corps étaient également ceux des nombreux Serbes tués lors des incursions des musulmans de Bosnie hors de Srebrenica dans les années précédant le mois de juillet 1995». La plupart des victimes musulmanes recensées en Bosnie étaient des combattants et non des civils, car les Serbes de Bosnie avaient évacué les femmes et les enfants de Srebrenica pour les placer en sécurité, ajoutait-il.

La guerre est finie, la division persiste

Les Accords de paix de Dayton de 1995 ont mis fin à la guerre et ont garanti le retour des anciens propriétaires sur leurs terres. Revenue dans sa propriété en 2000, la plaignante y a découvert une église orthodoxe. Elle a refusé d'accepter une compensation financière pour le site occupé par l'église et a exhorté ses enfants à ne jamais vendre le lot.

Les autorités locales ont l'intention de reconstruire l'église à l'entrée du village.

La Bosnie reste profondément divisée ethniquement. Les Serbes sont principalement des chrétiens orthodoxes, les Bosniaques sont majoritairement musulmans et les Croates sont majoritairement catholiques.

Une première

Contactée par Sputnik, Irina Antanasijevic, professeur à l’université de Belgrade, a rappelé que les musulmans avaient eux aussi construit des mosquées sur les territoires raflés aux Serbes. C’est notamment le cas de la mosquée Roi Fahd à Sarajevo (2000), construite sur un terrain serbe de Sarajevo (Bosnie-Herzégovine) grâce au financement accordé par l'Arabie saoudite comme la plus grande mosquée des Balkans. Ou de la mosquée érigée en 2000 dans la localité de Vrapcici, près de Mostar, dans le domaine d’un Serbe, ou bien de celle construite dans le village de Nocajevici, également sur la propriété d’un Serbe.

En effet, ces cas sont nombreux d’un côté et de l’autre, concède l’experte. «Mais dans le cas en question, il s’agit de la première décision de la cour de Strasbourg en la matière.»
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