Éric Zemmour a donné du grain à moudre à ceux qui voudraient décompter le temps de parole des éditorialistes, à l’approche d’échéances électorales. Le polémiste, souvent étiqueté comme un homme de droite, a pris ses détracteurs à contre-pied en fustigeant le libéralisme.
L’écrivain et essayiste a d’abord rappelé que ce libéralisme était historiquement «un mouvement de gauche», né au XIXe siècle, en lutte contre la restauration monarchique. Passé un bref moment à droite, le libéralisme est, selon Éric Zemmour, «revenu sur son aire, à gauche», depuis la chute de l’URSS.
Il est aujourd’hui devenu une doctrine «progressiste» qui pousse à la «dissolution des sociétés traditionnelles», a ajouté le polémiste.
«Le libéralisme détruit toutes les structures traditionnelles. Ils ont eu la peau de l'Église, de la monarchie, maintenant ils ont la peau de la famille, de la patrie. Ils veulent imposer la loi de l’individu et de la mondialisation aux structures intermédiaires, comme la nation», a ainsi expliqué Éric Zemmour sur CNews.
Cette apparition d’un «libéralisme de gauche», liant parfois des sujets culturels à des positions économiques, a déjà été théorisée par de nombreux intellectuels, comme Jean-Claude Michéa ou Michel Clouscard. Le terme de «libéral-libertaire» a récemment fait florès dans les débats politiques, notamment pour qualifier les héritiers de Mai 68 convertis au libre-échange et à la mondialisation.
Une grande partie de la gauche française, notamment celle issue du Parti socialiste, semble aujourd’hui acquise à ces thèses libérales, au point de se rallier à Emmanuel Macron, comme le précisait récemment à Sputnik le politologue Frédéric Saint Clair.
Victoire du modèle anglo-saxon
Au-delà de ce basculement vers un libéralisme de gauche, Éric Zemmour croit entrevoir aujourd’hui la défaite d’un libéralisme «à la française», moins centré sur l’individu et le marché que son pendant anglo-saxon.
«Les libéraux français [...] se sont opposés aux libéraux anglo-saxons, qui voulaient le règne de l’individu et du marché, alors que les libéraux français voulaient la modération par l’État, par la nation, par le patriotisme. Le drame, c’est que depuis les années 80-90, les libéraux français ont été avalés par les Anglo-Saxons, à travers la Commission de Bruxelles, à travers l’idéologie des universités américaines, etc.», explique-t-il sur CNews.
Ce libéralisme anglo-saxon, centré sur l’individu, a notamment pu contribuer à l’émergence du mouvement «woke» aux États-Unis, en promouvant l’«idée d’un désir qui ne peut être remis en cause», expliquait à Marianne Stéphanie Roza, chercheuse au CNRS en mai dernier.
Dans un récent entretien avec Causeur, Manuel Valls voyait pour sa part la montée du communautarisme outre-Atlantique comme une conséquence de ce «modèle social-libéral ou libéral-libertaire à l’anglo-saxonne». L’ancien Premier ministre fustigeait notamment la philosophie de Barack Obama et de Justin Trudeau sur la question.