Un programme de l’armée chinoise d’«humanisation des poumons» de souris avant la pandémie pose question

L’armée chinoise a conçu des souris «avec des poumons humanisés» en 2019, quelques mois avant le déclenchement de la pandémie de Covid-19, pour tester des virus sur ces animaux, avance une enquête menée par Vanity Fair. Mais le mystère plane toujours sur l’origine du virus meurtrier.
Sputnik

Une étude sur des souris portant sur leur sensibilité au SRAS-CoV-2, virus à l’origine de la pandémie qui fait rage depuis fin 2019, a été publiée en avril 2020, révèle une enquête réalisée par le magazine Vanity Fair.

Onze des 23 coauteurs de l’étude travaillaient pour l’Académie des sciences médicales militaires, l’institut de recherche médicale de l’armée chinoise.

En utilisant la technologie de modification du génome CRISPR, les chercheurs ont conçu des souris avec des poumons «humanisés». Le Conseil américain de sécurité nationale (NSC), enquêtant sur les origines de la pandémie, a établi que les petits mammifères rongeurs avaient été créés au cours de l’été 2019, donc avant le début de la pandémie, souligne le magazine.

Une fuite a-t-elle eu lieu?

Shi Zhengli, directrice adjointe de l’Institut de virologie de Wuhan, surnommée «Batwoman» en Chine suite à plusieurs de ses études sur les chauves-souris, aurait testé au moins deux nouveaux coronavirus sur des souris humanisées au cours des trois dernières années, expose Vanity Fair.

L’intéressée a réfuté les affirmations selon lesquelles le Covid-19 a fui d’un laboratoire de son institut et que l’institution menait des recherches militaires.

Une enquête menée par les autorités médicales chinoises dans le laboratoire de Wuhan n’a trouvé aucune preuve d’une fuite du virus, assurait pour sa part en mai 2020 Zhong Nanshan, épidémiologiste et pneumologue chinois.

En janvier 2021, le Département d’État a publié une note sur les activités de l’Institut de virologie de Wuhan, dévoilant que plusieurs chercheurs y étaient tombés malades avec des symptômes de type Covid-19 à l’automne 2019, avant que le premier cas d’épidémie ne soit identifié, et que les chercheurs avaient collaboré sur des projets secrets avec l’armée chinoise, y compris sur des expériences sur des animaux de laboratoire depuis au moins 2017.

La Chine a plus tard dénoncé une fiche d’information «pleine d’erreurs».

Des doutes et une nouvelle enquête

En février 2020, The Lancet, revue médicale de renom, a publié la lettre d’un groupe de 27 scientifiques qui rejetaient catégoriquement les assertions selon lesquelles le virus provenait du laboratoire de Wuhan et n’était pas d’origine naturelle.

De son côté Gilles Demaneuf, scientifique des données à la Bank of New Zealand à Auckland, a jugé que la déclaration des scientifiques ne contenait aucune preuve. Il a donc décidé de lancer sa propre enquête et a rapidement découvert qu’il y avait eu quatre fuites dans des laboratoires liés au SRAS depuis 2004, dont deux se sont produites dans un laboratoire de premier plan à Pékin. Il a exposé ses conclusions dans un article sur le site Medium.

Les enquêteurs du NSC ont pour leur part trouvé des preuves évidentes que les laboratoires chinois n’étaient pas aussi sûrs qu’annoncé. Shi Zhengli, elle-même, avait reconnu publiquement que jusqu’à la pandémie, toutes les recherches de son équipe sur les coronavirus, certaines impliquant des virus vivants de type SRAS, avaient été menées dans des laboratoires peu sécurisés, rappelle Vanity Fair, les décrivant comme «à peu près aussi sûres qu’un cabinet de dentiste américain».

Plus tard, Botao Xiao et Lei Xiao, deux scientifiques travaillant dans des universités distinctes à Wuhan, ont coécrit un article, notant que le Centre de prévention et de contrôle des maladies de Wuhan, connu pour avoir collecté plus de 600 échantillons de chauves-souris, est situé à seulement 280 mètres du marché de Huanan, qui serait le lieu d’origine des premiers cas de coronavirus.

Enfin, l’épidémiologiste russe Vladimir Dedkov, directeur adjoint de l’Institut Pasteur de Saint-Pétersbourg, seul Russe à avoir participé à une inspection de l’OMS à Wuhan début 2021, a de son côté remis en doute, à l’issue de la mission, l’hypothèse d’une fuite. Selon lui, il n’y a pas de preuve, directe ou indirecte, suggérant que la pandémie est née dans un laboratoire de Wuhan.

La Chine a quant à elle toujours fermement rejeté toutes les accusations la visant.

Discuter