Lancer des drones chargés d’électricité dans les nuages pour faire tomber de la pluie, c’est le pari un peu fou d’une équipe de chercheurs de l’université de Reading au Royaume-Uni, missionnée par les Émirats arabes unis.
L’émirat aux ambitions démesurées s’inquiète: avec dix centimètres de pluie par an, ses réserves d’eau douce sont fortement limitées. Afin de remédier à ce problème climatologique structurel, Abu Dhabi finance plusieurs projets scientifiques à travers le monde.
«C’est bien que quelqu’un essaie»
«Tant que l’on n’a pas essayé, on ne peut pas trancher, mais il y a peu de chances que ça marche. C’est bien que quelqu’un tente, et peut-être qu’ils y arriveront, mais pour moi, il y a près d’une chance sur dix que ça donne quelque chose», tempère François Bouttier, chercheur à Météo France.
D’un point de vue technique, la tentative de Keri Nicoll, l’une des têtes pensantes du projet, se heurte à la dure réalité du climat émirati. Dans un pays comme celui-ci, les nuages sont très hauts et les températures très élevées. Durant l’été, elles oscillent autour de 40 degrés en journée et peuvent monter jusqu’à 50 degrés. Dans de telles conditions météorologiques, les gouttes s’évaporent généralement avant d’arriver au sol.
Léger impact climatique
«On essaie de créer des gouttelettes assez grosses pour qu’elles survivent jusqu’au sol», explique Keri Nicoll au micro de CNN. Il faudra donc accorder du temps à cette hypothèse pour voir son application pratique. D’autant que pour l’instant, «l’équipe qui travaille sur ce projet n’en est qu’à un stade préliminaire de faisabilité technologique», rappelle notre interlocuteur.
Reste à savoir si cette modification météorologique n’aura pas de conséquences néfastes. À trop jouer les démiurges en transformant le climat, l’être humain ne créera-t-il pas des maux pires encore?
«Tout est une question d’échelle. Cette technique de drone, comme toutes les techniques d’ensemencement des nuages, c’est toujours à l’échelle locale. On est très loin de modifier le climat à grande échelle», répond François Bouttier.
«On est d’ailleurs très loin d’avoir les outils pour le faire à grande échelle», ajoute-t-il.
Source de conflits frontaliers?
En revanche, si ces technologies d’ensemencement des nuages venaient à voir le jour, se poseraient de nouvelles questions géopolitiques.
«Est-ce que les voisins des pays qui souhaitent faire pleuvoir artificiellement vont commencer à manquer d’eau parce que leur pluie est tombée ailleurs? C’est une question qui se posera certainement, mais nous n’en sommes pas encore là», explique le météorologue.
En attendant, les scientifiques britanniques disposent de quatre drones avec un système de pilotage automatique capable de voler durant quarante minutes. Les engins ont été développés à l’université de Bath, au Royaume-Uni, et devraient bientôt être testés dans le désert du Golfe.
Utiliser des particules de sel
Pour parvenir à leurs fins, les chercheurs disposent d’une subvention de 1,5 million de dollars répartie sur trois ans par le programme de recherche des Émirats pour la science de l’augmentation des pluies, une initiative dirigée par le Centre national de météorologie.
D’autres projets tels que l’utilisation de particules de sel dans les nuages avaient vu le jour, mais les expériences n’ont pas été concluantes.