Le Pentagone prêt à se pencher sur les réseaux sociaux des militaires pour lutter contre l’extrémisme?

Le Pentagone veut créer un programme permettant de surveiller les dérives extrémistes sur les comptes des réseaux sociaux des militaires, rapporte The Intercept. Un filtrage par mots-clés qui laisse les observateurs sceptiques.
Sputnik

Cinq mois après l’assaut du Capitole par des partisans de Donald Trump, les autorités américaines s’emploient à lutter contre l’extrémisme, notamment dans les forces armées. Dans cette logique, le Pentagone s’apprête à lancer un programme pilote pour déceler les contenus extrémistes sur les comptes des réseaux sociaux des militaires, relate le magazine d’investigation en ligne The Intercept.

Ce projet devrait permettre une surveillance «en continu» des personnels militaires, filtrant les réseaux sociaux à la recherche de «comportements préoccupants», ajoute le média citant une source interne au département de la Défense.

Le programme pourrait s’appuyer sur des sociétés de surveillance privées, pour contourner les restrictions liées au premier amendement de la Constitution. La société controversée Babel Street serait notamment plébiscitée. L’entreprise a déjà été critiquée par le passé, pour avoir acheté des données de localisation cellulaires en vrac et les avoir revendues à des agences fédérales. Un procédé qui permet aux autorités de se passer de mandat pour collecter des contenus numériques.

Babel Street a notamment fait affaire avec les forces spéciales américaines, leur communicant des données de localisation acquises sur une importante application de prière musulmane, rapportait le média Vice en novembre.

Recherche par mots-clés

Concrètement, le programme pilote du Pentagone devrait effectuer un filtrage par mots-clés sur les réseaux sociaux, à partir d’une liste préalablement établie. Et ce, pour tenter de ne pas violer les lois sur la liberté d’expression. Un procédé jugé défaillant par certains, car il pourrait entraîner un risque de «faux positifs» et de fausses alertes.

«Utiliser des mots-clés pour surveiller les réseaux sociaux n'est pas seulement une invasion inutile de la vie privée, c'est une stratégie imparfaite […]. Cela produira sans aucun doute un flot de faux positifs qui gaspilleront les ressources de sécurité et saperont le moral», explique ainsi à The Intercept Mike German, agent du FBI spécialisé dans l’infiltration de groupes néo-nazis.

Le 9 avril, le secrétaire à la Défense Lloyd Austin avait annoncé la création du groupe de travail sur la lutte contre l'extrémisme, qui devait recevoir l’avis «d'experts internes et externes». La présence de groupes conservateurs, voire hostiles à l’islam, parmi ces spécialistes, avait soulevé la polémique. L’Institut de recherche des médias du Moyen-Orient (MEMRI) faisait notamment partie des organismes consultés, rapportait alors The Intercept.

La question de la surveillance des réseaux sociaux avait également soulevé la polémique fin avril aux États-Unis, cette fois-ci au sujet de l’immigration. La Maison-Blanche avait en effet rejeté une proposition du département de la Sécurité intérieure visant à collecter les identifiants des comptes des réseaux sociaux sur les formulaires de voyage et d'immigration.

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