La situation sanitaire en lien avec l’épidémie de Covid-19 se corse en Tunisie. En effet, le pays a enregistré une importante augmentation de cas confirmés ces derniers jours due, selon le ministère de la Santé, à la présence de beaucoup de variants du virus. Ceci en plus d’un dangereux relâchement quant à l’observance des règles d’hygiène sanitaire et du couvre-feu décrété dans plusieurs villes du pays.
Pour faire le point sur la situation dans le pays et sur l’état d’avancement de la campagne de vaccination lancée le 13 mars, Sputnik a sollicité la docteure Nissaf Ben Alaya, porte-parole du ministère de la Santé et directrice de l'Observatoire national des maladies nouvelles et émergentes (ONMNE).
Dans le même sens, dans une déclaration à Sputnik, le docteur Mohamed Ghodbani, directeur régional de la Santé à la délégation de Sousse, tire la sonnette d’alarme quant à l’incapacité de plusieurs hôpitaux de prendre en charge les patients dans les services d’urgence et de réanimation.
«Un nouveau pic d’hospitalisation»
«La situation épidémiologique est très grave actuellement en Tunisie», affirme Mme Ben Alaya, soulignant que «cette semaine le pays a enregistré un nouveau pic en termes de nombres de personnes infectées, hospitalisées, en soins intensifs et sous respirateur par rapport au dernier pic observé fin janvier».
Ainsi, la responsable a mis en garde contre «le rythme accéléré de propagation de la pandémie et du nombre de décès qu’elle engendre».
Quelle est la cause de cette fulgurante hausse?
Selon Nissaf Ben Alaya, la première cause qui explique la hausse du nombre de contaminés «est le relâchement de la vigilance quant au respect des consignes d’hygiène sanitaire, dont notamment la distanciation physique et le port du masque, durant les rassemblements et événements familiaux, comme les fêtes de mariage, les enterrements…».
Cependant, elle ajoute que «192 nouvelles souches du coronavirus ont été détectées pendant cette période critique dans plusieurs régions du pays», précisant que «le niveau d’alerte est actuellement "très élevé" dans 15 gouvernorats [régions, ndlr] et 111 délégations [départements, ndlr]».
«Au début de la campagne de vaccination, la courbe des contaminations a légèrement baissé et nous avons appelé à observer scrupuleusement les consignes d’hygiène afin de soutenir la préservation de ces indicateurs positifs et que l’efficacité vaccinale soit optimale», relate-t-elle, déplorant «le relâchement constaté conjugué à l’apparition de nouveaux variants». «Les personnes touchées dans cette phase font partie de la tranche d’âge des moins de 65 ans», précise-t-elle, soutenant que «70% des contaminations sont dues aux nouveaux variants».
Quid de la campagne vaccinale?
Concernant le déroulement de la campagne vaccinale anti-Covid lancée le 13 mars, Nissaf Ben Alaya indique que la Tunisie a réceptionné à ce jour «93.600 doses du vaccin Pfizer et 98.400 unités du vaccin AstraZeneca dans le cadre de l’initiative COVAX». Par ailleurs, le pays a également acquis «84.000 doses du vaccin Pfizer-BioNTech et reçu un don chinois de 200.000 doses du vaccin CoronaVac». «À ce jour, nous n’avons enregistré aucun cas grave d’effets secondaires», précise-t-elle, ajoutant qu’au 15 avril, 191.625 personnes ont été vaccinées sur un ensemble de 1.119.505 inscrits.
«Actuellement, 78% des personnes vaccinées avec Spoutnik V ont reçu leur deuxième dose», informe la porte-parole du ministère, rappelant que son pays «dispose de tous les moyens au niveau scientifique et dans le domaine de la recherche pour réussir à fabriquer localement des vaccins dans le cadre d’une coopération bilatérale avec les pays producteurs, dont la Russie».
Alerte rouge à Sousse
Actuellement, la ville de Sousse enregistre pratiquement 150 nouveaux cas par jour et entre quatre à cinq décès par jour, indique le docteur Mohamed Ghodbani, soulignant que «la situation dans la région est devenue très inquiétante».
Selon lui, le nombre de malades a dépassé les 20.000 depuis le début de l’épidémie, alors que le nombre de morts est actuellement au-dessus de 650.
Ainsi, «le flux de malades pris en charge dans les hôpitaux universitaires est devenu très important, mettant en grande difficulté ces structures qui ont de plus en plus de mal à assurer la prise en charge, notamment dans les services de réanimation saturés à 100%». «Également, les lits à oxygène sont occupés à 80%, ce qui fait que les médecins, à l’instar de ce qui s’est passé dans d’autres pays du monde, font le choix de concentrer leurs efforts pour soigner les malades qui ont le plus de chances de survivre à la maladie», explique-t-il, informant qu’«actuellement nous disposons d’un seul lit de réanimation pour cinq malades en attente dans les services des urgences».
Dans le contexte du début du mois de ramadan, le docteur Ghodbani, qui rappelle que les services sanitaires ont découvert la variant britannique, connu pour sa rapidité de contamination, chez cinq patients, appelle «tous les citoyens de la région à faire preuve de la plus grande vigilance en respectant les gestes barrières et à s’inscrire rapidement dans les deux centres régionaux de vaccination qui reste le meilleur moyen de vaincre la maladie».