«L'épidémie de Covid-19 ne permettait pas à ces délégations de se retrouver dans des conditions pleinement satisfaisantes», ont annoncé les services de Jean Castex à l'AFP.
Le comité intergouvernemental franco-algérien, cadre prévu pour cette rencontre, «est donc reporté à une date ultérieure, lorsque le contexte sanitaire sera plus favorable», ont ajouté les services du Premier ministre.
Mais de sources concordantes françaises et algériennes, le format de la délégation française, réduit en raison de l'épidémie, a été jugé insuffisant par les autorités hôtes, mécontentes, ce qui a précipité cette annulation tardive.
«Le format de la délégation n'est pas à la hauteur» selon Alger, a ainsi indiqué une source française ayant connaissance du dossier. «La visite a été réduite à une seule journée et la délégation à quatre ministres. C'est un sous-format alors qu'il y avait beaucoup de dossiers bilatéraux à étudier», a confirmé une source algérienne.
La France et l’élection de Tebboune
La visite du Premier ministre français devait marquer une nouvelle étape dans le réchauffement bilatéral engagé par Emmanuel Macron et Abdelmadjid Tebboune.
Après des tensions lors du soulèvement populaire du Hirak il y a deux ans, M. Macron a opté pour un soutien ouvert au Président Tebboune, dont l'élection fin 2019 a été massivement rejetée par la population et qui reste contesté dans la rue, un appui qui suscite des critiques au sein du mouvement pro-démocratie.
Les deux pays entretiennent des relations tumultueuses depuis des décennies, fruit de l'histoire coloniale et de la guerre d'indépendance algérienne (1954-1962). En France comme en Algérie, cette histoire partagée est un sujet sensible pour une frange importante de la population.
Rapport controversé sur la guerre d’Algérie
Emmanuel Macron, premier Président français né après la guerre d'Algérie, a fait certains gestes d'ouverture pour tenter d'apaiser cette relation, comme par exemple la reconnaissance de l'assassinat d'un militant indépendantiste, ou encore une ouverture des archives françaises de la période de la guerre.
Ces initiatives font partie des recommandations mémorielles de l'historien Benjamin Stora dont le rapport a été critiqué en Algérie parce qu'il ne préconise notamment pas les «excuses» de Paris.
Le chef de l'État algérien a réaffirmé dimanche que la mémoire nationale «ne saurait faire l'objet de renonciation ni de marchandage» alors que les gouvernements algériens successifs ont utilisé la guerre d'indépendance contre la France comme ciment politique.
Objectifs de la réunion annulée
La réunion de dimanche avait pour but de tenir pour la première fois depuis décembre 2017 un «Comité intergouvernemental de haut niveau», coprésidée par M. Castex et son homologue Abdelaziz Djerad, afin de faire notamment le point sur la coopération économique entre les deux pays.
Plusieurs sujets étaient sur la table (économique, sécuritaire, éducation, culture) et des accords «dans quelques domaines de coopération» devaient être signés, avaient indiqué le service du Premier ministre français, sans préciser.
En préambule à la visite désormais reportée, le chef d'état-major des armées français, le général François Lecointre, a été lui reçu à Alger jeudi par le chef d'état-major de l'Armée nationale populaire (ANP) Saïd Chanegriha pour un déplacement non annoncé au cours duquel le militaire algérien a sollicité l'assistance de Paris pour la «réhabilitation» des sites des essais nucléaires français au Sahara il y a 60 ans.