Le Covid-19, une aubaine pour les charlatans? «Plus de 500 nouveaux petits groupes sectaires ont proliféré à la faveur du confinement», a avancé Marlène Schiappa, ministre déléguée à la Citoyenneté, dans une interview donnée à France Info. Les dérives sectaires auraient «considérablement» augmenté, a-t-elle estimé. Dans ces groupes se trouvent 140.000 personnes, dont 90.000 enfants et adolescents. Pratique d’exorcisme, stage de survivalisme extrême, déviances dans le domaine de la santé, autant de pratiques qui sont dans le viseur du ministère de l’Intérieur.
«Vous avez de nouveaux gourous qui se servent de la pandémie pour prêcher des mesures soi-disant de bien-être, mais qui sont des mesures de sujétion psychologique, voire de captation d’argent ou de biens», a fustigé la ministre déléguée à la Citoyenneté.
La dérive sectaire repose d’ailleurs sur «trois piliers», à savoir: une idéologie, un gourou et un phénomène d’emprise. Pour souligner cette dérive, dans L’Obs, Marlène Schiappa prenait l’exemple du naturopathe Thierry Casasnovas qu’elle qualifie de «théoricien du crudivorisme qui diffuse des thèses complotistes».
Les réseaux sociaux, terreaux fertiles pour les dérives sectaires
Didier Pachoud, président de GEMPPI, constate de son côté une recrudescence de ce type de phénomènes. Son association lutte contre les sectes et les dérives sectaires.
«Actuellement, il y a des dizaines de milliers d’opérateurs potentiellement sectaires», estime-t-il, alors que, lorsqu’il a démarré son activité il y a plus de trente ans, «on avait 200 dossiers pour la France.» Par ailleurs, il indique avoir observé durant cette crise sanitaire un «basculement important vers les dérives thérapeutiques, holistiques.»
«Dans nos statistiques de 2020, sur 1.200 demandes d’aides et d’informations, la part des questionnements sur le sectarisme religieux, qui les années précédentes étaient à peu près de 50%, est passés à 30%. En revanche, la part de sectarisme du type panthéiste, énergétique, New Age, thérapeutique holistique est passé à 70%», détaille le président de GEMPPI.
De son côté la MIVILUDES (Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires) a reçu 3.000 signalements en 2020, «dont 700 ont été évalués comme sérieux.»
3.000 signalements en 2020
Près de 40% concernaient des questions de santé ou de bien-être et 25% des mouvements religieux. Des proportions qui inquiètent Didier Pachoud. D’autant plus que les réseaux sociaux pourraient aggraver la situation et rendre le «phénomène moins préhensible», s’alarme-t-il.
«Avec le Covid, les gens se sont formés à l’outil Internet, en particulier aux visioconférences, sont allés plus souvent chercher de l’information sur YouTube, etc. Beaucoup se sont improvisés gourous ou “sachants” dans le domaine de la santé, cela démultiplie le nombre de micro-intervenants.»
Pour tenter d’endiguer le phénomène, le président du GEMPPI souligne qu’il était important notamment de faire de la «prévention de masse», ou encore «se former à la gestion des risques sectaires». Le gouvernement a indiqué que le budget de la MIVILUDES sera multiplié par dix, soit un million d’euros au total, afin de «mieux financer les initiatives locales et associatives sur le terrain».