Annoncé depuis plus d’un an, le contrat relatif à l’acquisition par l’Armée nationale populaire (ANP) algérienne de 14 bombardiers russes de moyen à long rayon d’action Su-34E vient d’être confirmé, indique le site algérien d’information militaire Menadefense, citant des sources proches du dossier.
Dans un entretien à Sputnik, Akram Kharief, directeur de Menadefense, explique l’importance de cette acquisition pour l’ANP quant à l’équilibre stratégique dans la région, mais aussi en Méditerranée occidentale et en partie orientale face aux membres de l’Otan.
Un «premier lot de six Su-34E»
«Il a fallu plus de huit ans de négociations, avec des hauts et des bas des deux côtés, pour parvenir enfin à un accord acceptable», informe le média, soulignant que «le regain d’intérêt pour le Su-34 est venu après sa participation à la guerre contre le terrorisme en Syrie, où il a démontré ses capacités au combat, sa robustesse et son endurance».
Selon Menadefense, qui rappelle que la partie russe est tenue dans ces contrats par une clause de non divulgation avant le début de la livraison des appareils, «l’usine aéronautique de Novossibirsk (NAZ) a commencé en janvier la production d’un premier lot d’urgence de six Su-34E pour l’Algérie». «Il devrait être prêt à partir de la fin 2021 et servira pour la formation des pilotes instructeurs algériens», ajoute le média, précisant que le reste des aéronefs «sera réceptionné entre 2022 et 2023».
Enfin, le site algérien d’information militaire explique que, selon ses sources, «il s’agit d’une première commande pour la constitution d’un escadron de bombardiers tactiques à long rayon d’action». Après son intégration dans l’Armée de l’air algérienne, «si l’appareil donne pleine satisfaction, deux autres escadrons pourraient être constitués».
Quel impact stratégique sur les capacités de l’ANP?
Dans un entretien à Sputnik, Akram Kharief explique que l’acquisition par l’ANP d’un escadron de 14 de ces Su-34E «constitue un important développement dans ses capacités de bombardement à haute précision et à longue distance d’action au sol et surtout en mer».
Et de préciser que «la seule différence entre la version du Su-34 utilisée par la Russie et celle du Su-34E acquise par l’Algérie est dans l’IFF [Identification, Friend or Foe, système d'identification chiffré mis au point pour le commandement et le contrôle, ndlr] et le système de communication, le reste étant identique, y compris l’accès à l’armement sophistiqué».
«Ces Su-34E sont des bombardiers possédant des capacités d’autodéfense dignes des meilleurs chasseurs, ce qui supprime donc le fardeau de leur protection, et qui même chargé gardent un rayon d’action allant jusqu’à 1.000 kilomètres sans ravitaillement aérien», soutient-il, ponctuant qu’«ils ont la capacité de transporter jusqu’à 12 tonnes de bombes, missiles et roquettes avec de multiples configurations de combat».
Ainsi, rappelant que l’Algérie a toujours misé sur le développement d’une importante capacité de bombardement, «conformément à sa doctrine militaire et contrairement à la Tunisie et au Maroc par exemple», M.Kharief informe que dans l’optique d’«équiper ces aéronefs de missiles supersoniques antinavires, avec le Yakhont russe ou le Brahmos russo-indien, les Su-34E algériens auront la capacité de couvrir à une bonne distance de sécurité toute la Méditerranée occidentale et une partie de l'orientale, avec peu d'équivalents ailleurs». «Cela remettra en cause les équilibres», estime-t-il.
Les missiles Yakhont ou Brahmos permettent d'attaquer une cible au-delà de l'horizon tout en étant capables de choisir parmi de nombreux types de trajectoires de vol (haute ou basse altitude, ou un mélange des deux). Ils sont également très résistants aux contre-mesures électroniques. Ils sont supersoniques durant toutes les phases du vol, ne laissant pas le temps à la cible de se défendre. De plus, ils peuvent être tirés depuis la terre ferme, les airs, la surface de la mer ou encore depuis un sous-marin. Enfin, une version hypersonique Brahmos-II est en cours de développement.