Le transfert des patients franciliens vers la province, une solution de court terme?

Sur fond de hausse constante du nombre de patients en réanimation, le transfert des malades ne semble pas être une «solution pérenne» faute de mesures contre la transmission du virus, selon un chef de service d’un hôpital parisien. En plus de cela, le manque de lits et les difficultés logistiques viennent se greffer à la crise.
Sputnik

Ayant débuté ce samedi, le transfert des malades graves du Covid-19 de région parisienne vers la province risque de ne pas être une solution à long terme en raison de plusieurs difficultés et d’une hausse constante du nombre de patients en réanimation.

Revenant sur la situation dans son service auprès de BFM TV, le chef de réanimation médicale et infectieuse à l’hôpital Bichat de Paris Jean-François Timsit a constaté une «augmentation plus importante la dernière semaine» de ce nombre de patients, laquelle se manifeste de manière «beaucoup plus sensible».

Contraintes de transférabilité

En dépit de ce dispositif de déprogrammation censé diminuer la pression sur le secteur hospitalier en Île-de-France, il est impossible de transférer n’importe quel patient. Par exemple, «pour 16 patients Covid-19, un seul malade est transférable ou potentiellement transférable», a fait savoir Jean-François Timsit.

Plusieurs critères sont à respecter pour pouvoir évacuer des patients extrêmement graves. Ils doivent être «stables d’un point de vue ventilatoire et d’un point de vue cardiaque», explique Frédéric Adnet, directeur médical du SAMU de Seine-Saint-Denis, toujours pour BFM TV. En plus de cela, il faut obtenir «l’accord et le consentement des proches».

Manque de lits

À cette difficulté s’ajoute celle de trouver actuellement des places dans les établissements de santé en aval, ce qui n’avait pas été le cas l’année précédente lorsque certaines régions avaient été moins concernées par l’épidémie, poursuit le président de Samu-Urgences France François Braun dans une interview à L’Obs ce 12 mars.

«Pendant la première vague, on ne s’est pas trop posé de questions car les régions les plus touchées - l’Île-de-France, une partie du Grand Est et des Hauts-de-France - ont pu évacuer vers des régions peu voire pas du tout touchées», précise François Braun.

Ce alors que maintenant, «dans plusieurs régions, les services sont à saturation», a-t-il ajouté.

Difficultés logistiques

Les évacuations sanitaires peuvent être effectuées par voies ferroviaire et aérienne. Chose qui avait été plus facile à organiser lors de la première vague car, quand «les trains étaient arrêtés, il n’y avait pas de contrainte horaire et les voies nous étaient réservées», poursuit M.Braun.

«Ce n’est plus le cas. On pourrait soit transférer la nuit, mais on ne peut plus rouler à grande vitesse, soit trouver des créneaux».

Ce 13 mars, trois premiers patients Covid-19 en réanimation d'Île-de-France ont été transférés par hélicoptère vers des hôpitaux de l'ouest du pays. Une évacuation plus massive par TGV n'aura lieu qu'en «milieu de semaine prochaine» en raison d’«une énorme logistique à mettre en place», a fait savoir Frédéric Adnet à l’AFP.

Des restrictions sont-elles à venir?

Face à la hausse du nombre de patients en soins intensifs, cette mesure pourrait aider le secteur hospitalier, «mais ce ne sera pas une solution pérenne», a tranché le chef du service de réanimation à l’hôpital Bichat auprès de BFM TV.

Bien que la possibilité d’un reconfinement en Île-de-France ait toujours été présentée par le gouvernement comme la mesure à éviter, les autorités pourraient revisiter la stratégie sanitaire lors d’un prochain point sur l’épidémie prévu dimanche 14 mars. «Un confinement du week-end ou même un confinement total, rien n’est exclu», a déclaré un membre de l’exécutif à la chaîne de télévision.

Un traitement différent en fonction de territoires

L’absence de confinement en Seine-Saint-Denis alors que le département partage les mêmes chiffres sanitaires que la région PACA, confinée pour un troisième week-end consécutif, a été pointée par Renaud Muselier, président de la région Provence-Alpes-Côte-d'Azur, sur Franceinfo.

«Il y a une décision de confinement dans les Alpes-Maritimes qui ne correspond pas à des critères stables, équitables et compréhensibles par la population, et quand il y a une différence de critères, il y a forcément une différence de traitement, et donc il y a une injustice.»

Il a notamment tenu à mettre en valeur un taux de positivité de 13% en Seine-Saint-Denis contre 10% dans les Alpes-Maritimes.

En dépit de la différence de traitement, la situation sanitaire en Île-de-France a été qualifiée d’«extrêmement tendue» par Jean Castex lors de son discours du 12 mars, prononcé dans l’hôpital universitaire de la Pitié-Salpêtrière.

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