#DésobéissanceCivile, #Jenemereconfineraipas ou encore #StopDictatureSanitaire. Ces mots-dièses essaiment sur les réseaux sociaux depuis plusieurs semaines. Propulsés pour protester contre les mesures de restrictions sanitaires, ils n’ont pas eu le succès espéré par leurs auteurs. Si de nombreux Français en ont effectivement ras le bol des entraves à leurs libertés mises en place pour lutter contre la propagation du Covid-19, ils seraient une large majorité à accepter leur sort. C’est en tout cas ce qui ressort de la quatrième vague du Baromètre des deux crises IFOP pour No Com.
D’après l’enquête d’opinion, 72% des Français interrogés «se disent prêts à accepter un nouveau confinement dans les prochaines semaines, si cette voie était finalement privilégiée par l’Exécutif». Un score qui, comme le souligne l’IFOP, «permet de relativiser l’ampleur du mouvement de contestation des restrictions sanitaires.»
Les dénonciateurs de la «dictature sanitaire» comme le leader des Patriotes, Florian Philippot, ont-ils échoué? «La peur» que l’ex-numéro 2 du FN fustigeait récemment au micro de Sputnik a-t-elle pris le dessus?
«Il suffit que les Français allument leur télévision pour qu’on leur injecte en intraveineuse de la peur, que ce soit le gouvernement, le Conseil scientifique, les grands médias», dénonçait ainsi l’ancien bras droit de Marine Le Pen.
Pourtant, d’après l’IFOP, la part des Français qui ne craignent pas d’être infectés par le virus dans les semaines qui viennent est passée de 44% fin octobre dernier à… 52% en février. Nouveau paradoxe.
Moins de peur du virus, plus d’acceptation du confinement
Les Français ont donc moins peur du virus, mais sont tout de même prêts à se reconfiner. Si, pour le moment, l’option n’est pas envisagée, «l’heure n’est pas au relâchement», comme l’a expliqué Olivier Véran, ministre de la Santé, lors d’un point presse le 18 février. Les Français devront supporter encore pour un moment le couvre-feu mis en place à 18h. Cette stratégie a été privilégiée par l’exécutif justement pour éviter un troisième confinement qui est dorénavant considéré comme une solution de dernier recours.
«Il est possible qu’on ne soit jamais reconfinés», lançait même Olivier Véran le 9 février. L’option a d’ailleurs à nouveau été écartée à la suite du dernier Conseil de défense du 17 février à la suite duquel aucune restriction supplémentaire n’a été annoncée. Mais Gabriel Attal, porte-parole du gouvernement, a affirmé que «la situation reste si fragile qu’un rien peut la faire basculer.»
Les chiffres de l’épidémie restent en effet mauvais et la menace des variants plus que jamais présente. De bonnes nouvelles ont bien été enregistrées ces derniers jours, comme la baisse de la circulation du virus ou une pression sur l’hôpital en baisse. Mais Santé publique France a prévenu qu’«avec la progression soutenue des variants plus transmissibles, […] une aggravation de la situation épidémiologique dans les prochaines semaines fait partie des scénarios à envisager, comme en attestent certains travaux de modélisation.»
«Il est possible qu’on ne soit jamais reconfinés»
Même son de cloche du côté de Jean Castex, en déplacement à Bordeaux ce 19 février: «Il y a beaucoup d’incertitudes, il y a les variants… Ça reste compliqué, ça reste préoccupant», a souligné le Premier ministre.
C’est notamment le cas en Moselle, où des centaines de cas de variants sud-africain et brésilien ont été détectés. François Grosdidier, maire LR de Metz, appelait récemment sur BFMTV à reconfiner la Moselle:
«Quand on atteint la cote d’alerte, […] il faut un vrai confinement, qui soit limité dans l’espace et dans le temps, mais qui soit un vrai coup de frein. […] Je pense aussi qu’il faut fermer plutôt les écoles», a affirmé l’ancien sénateur.
Si les Français sont majoritairement prêts à être reconfinés, les conséquences d’une telle mesure seraient fortes. Économiquement pour commencer. Une troisième mise sous cloche du pays retarderait davantage la reprise d’activité de secteurs entiers tels que la restauration, la culture, l’événementiel ou les salles de sport.
Le «quoi qu’il en coûte» d’Emmanuel Macron a permis à de nombreuses entreprises de rester en vie. «Pour faire face à l’épidémie, l’État a engagé 44,1 milliards de dépenses supplémentaires, dont 41,8 milliards de dépenses d’urgence, selon des chiffres de Bercy», note BFMTV.
Mais la manœuvre s’est traduite «par le déficit budgétaire le plus élevé de [notre] histoire contemporaine», selon les mots du ministre de l’Économie, Bruno Le Maire.
178 milliards d’euros pour être précis. Du jamais vu depuis la Seconde Guerre mondiale.
De quoi faire dire à Olivier Dussopt, ministre délégué aux Comptes publics, que «si 2021 marquera la fin de la crise et de la pandémie comme tout le monde l’espère, il faut aussi que 2021 marque la sortie du “quoi qu’il en coûte”».
Un troisième confinement pousserait donc l’exécutif à dégrader davantage les comptes du pays afin de ne pas risquer de provoquer une multiplication des banqueroutes. Cette dernière est de toute façon crainte par l’OCDE, pour qui les mesures de soutien mis en place par les États peuvent «ne faire que retarder une nouvelle vague de faillites.» Un nouveau confinement ne ferait qu’aggraver la situation.
Une dégradation de la situation économique qui serait accompagnée d’un nouveau coup porté à la santé mentale de beaucoup de Français, très émoussée par une crise qui n’en finit plus. Plusieurs spécialistes ont tiré la sonnette d’alarme concernant l’explosion de cas de dépressions liées à la pandémie. «Dans les consultations, on voit le moral qui est en vrille. On ne va pas avoir une épidémie de Covid-19, mais une épidémie de gens déprimés, de gens qui sont au bord du suicide», lançait le 10 février Jean-Paul Hamon, président d’honneur de la Fédération des médecins de France, sur le plateau de CNews.
Même son de cloche du côté du Dr Fabien Quedeville, médecin généraliste à Chilly-Mazarin, dans l’Essonne, qui confiait récemment son analyse à France 3. D’après lui, en cas de troisième confinement, «il pourrait y avoir une forte aggravation de la souffrance». Et d’ajouter:
«Je pense surtout aux jeunes qui n’ont plus de perspectives d’avenir, surtout dans des domaines comme la restauration, l’hôtellerie, la restauration. Cette population va vraiment souffrir de l’aggravation de ces mesures, comme la population âgée. Il y aura forcément augmentation des syndromes dépressifs et des risques de suicide.»