La France pourra-t-elle échapper à un troisième confinement? Si l’on en croit les informations d’Europe 1 ce mercredi 20 janvier, rien n’est moins sûr. Pour la radio, qui cite «plusieurs sources gouvernementales»: «La question n’est plus de savoir si un troisième confinement aura lieu, mais plutôt quand.» «Le gouvernement pourrait faire son annonce dès la semaine prochaine et l’instaurer à la fin du mois», poursuit la radio du groupe Lagardère.
En cause: la propagation incontrôlable du variant anglais sur le territoire français. Selon une étude préliminaire réalisée par des chercheurs de l’Inserm, ce variant, bien plus contagieux que ne l’était le SARS-CoV-2 originel, pourrait devenir «dominant» en France d’ici à «fin février/mi-mars». Il représente pour le moment environ 1,4% des cas selon l’Inserm. Les contaminations pourraient de nouveau atteindre le pic de la première vague du printemps 2020 (environ 25.000 par jour). D’où la crainte d’un nouvel engorgement des hôpitaux.
Outre cette possible dégradation de la situation sanitaire, ce sont surtout les conséquences psychologiques et économiques des restrictions sociales que redoute le philosophe Jean-Loup Bonnamy, auteur avec Renaud Girard de Quand la psychose fait dérailler le monde (éd. Gallimard). «Un troisième confinement serait une très mauvaise décision, car le pays est déjà exsangue. Il a reçu des coups extrêmement durs sur le plan économique, social, psychologique, mais aussi sur le plan des libertés publiques», estime ainsi l’essayiste.
«Nous sommes très désorganisés et très dysfonctionnels»
À ces difficultés s’ajoute la lenteur de la France dans le processus de vaccination. Au 19 janvier, le pays a vacciné 0,74 habitants sur 100. Comparativement aux autres pays de l’Union européenne, la France se place juste devant le Luxembourg, les Pays-Bas et la Bulgarie.
«L’extraordinaire lenteur à vacciner a mis en lumière la surbureaucratisation et l’inefficacité logistique de la France: nous sommes très désorganisés et très dysfonctionnels», fustige Jean-Loup Bonnamy.
Les déboires du laboratoire français Sanofi dans la mise au point du vaccin, reporté de plusieurs mois, seraient un camouflet supplémentaire pour l’industrie du pays selon le philosophe. «La France est le seul membre permanent du Conseil de sécurité de l’ONU qui n’ait pas su produire son propre vaccin, contrairement à la Russie ou aux États-Unis. Il faudra tirer les leçons de cette crise sanitaire pour réindustrialiser notre pays», lance-t-il.
«Génération sacrifiée»
Cela sans compter les dégâts psychologiques et économiques que les restrictions du gouvernement font peser sur la vie de l’ensemble des Français. La question de savoir si les autorités publiques pouvaient «sacrifier» la qualité de vie de millions de personnes pour sauver celle de quelques milliers d’autres a justement été posée au Premier ministre ce lundi 18 janvier sur France 5. «Je ne me pose pas la question en ces termes: il ne faut jamais renoncer par principe à sauver des vies», a répondu Jean Castex.
Les causes de décès imputables aux restrictions imposées par le gouvernement sont toutefois nombreuses: suicides (en particulier d’étudiants privés de cours et de vie sociale), aggravations d’états de santé antérieurs à l’épidémie, etc.
«Le péril le plus grave auquel nous sommes confrontés est la déstructuration des chaînes d’approvisionnement de produits agricoles, paralysées par le confinement des pays exportateurs. Sur une planète mondialisée, où règne l’interdépendance, le confinement généralisé a produit des désordres qui risquent de causer bien davantage de morts que la Covid-19», écrivent ainsi Jean-Loup Bonnamy et Renaud Girard dans leur livre.
«À cause du premier confinement du printemps dernier, un million de personnes ont basculé dans la pauvreté», illustre Bonnamy. «Je redoute l’apparition d’une génération sacrifiée, avec des conséquences extrêmement lourdes pour les plus jeunes. Un pays ne peut pas sacrifier ainsi sa jeunesse.»
Las, les protestations étudiantes sont pour le moment restées lettre morte pour l’exécutif. Le 15 janvier dernier, une étudiante de Sciences Po Strasbourg interpellait Emmanuel Macron sur la détresse des étudiants. Pour toute réponse, le chef de l’État lui a demandé de «tenir» et de faire «encore un effort». À partir du 25 janvier, les étudiants de première année pourront reprendre les travaux dirigés par demi-groupe, a annoncé à cette occasion le Président de la République.
Les mesures pires que le Covid?
«La Covid-19, même si elle pose un vrai problème de santé publique, n’est pas du tout une épidémie terrible comme pouvait l’être la peste au Moyen Âge. Cette maladie tue en très grande majorité des sujets âgés, voire très âgés, et le taux global de mortalité est inférieur à 0,5%,» avance le philosophe.
Si le taux de mortalité rapporté à l’ensemble de la population française se situe en effet un peu au-dessous de 0,5%, le taux de létalité (calculé à partir des personnes déjà infectées) serait quant à lui plus élevé. Selon les chiffres de l’université américaine Johns-Hopkins, avec 96.218.601 cas de personnes déclarées infectées du Covid-19 dans le monde et 2.058.534 décès, le taux de létalité serait d’environ 2,1%. En France, avec 2.938.333 cas et 71.342 décès, le pourcentage de létalité serait quasi équivalent, à 2,4%.
Les chiffres varient bien évidemment en fonction des pays et des régions, mais surtout en fonction des tranches d’âge retenues. Selon les données transmises par l’Imperial College de Londres, le taux de létalité serait quasi nul pour les personnes âgées de 0 à 40 ans, tandis qu’il pourrait grimper à 17% pour les plus de 90 ans.
«Le fait de détruire méthodiquement le pays pour une maladie avec un taux de mortalité aussi faible relève du pétage de plombs», s’emporte Jean-Loup Bonnamy.