«Prévenir une prochaine épidémie implique inévitablement de repenser l’action publique en élaborant un plan de sortie de l’élevage intensif.»
Dans une lettre ouverte publiée ce vendredi 15 janvier, l’association de protection animale L214 a interpellé Emmanuel Macron sur la nécessité d’agir pour sortir de ce système de production. Pour l’association, qui a également lancé une pétition, «une telle initiative viserait à suspendre immédiatement la construction ou l’extension des élevages intensifs et industriels qui confinent les animaux dans des bâtiments fermés, dans des cages, les forçant à vivre dans des conditions de promiscuité extrêmes.»
Dans ce plan, L214 plaide notamment en faveur d’une «réduction de la consommation des produits carnés» en développant «une végétalisation d’ampleur de l’alimentation en restauration collective publique ou privée.»
Des lobbys puissants qui maintiennent le statu quo?
Pour Muriel Arnal, présidente fondatrice de One Voice, association de défense des droits des animaux, la «société doit changer»: l’élevage intensif «n’est plus un modèle viable et acceptable», affirme-t-elle. Alors, comment expliquer qu’il n’y ait pas encore eu de changement en la matière? Pour elle, l’explication se trouve du côté des lobbys qui veulent maintenir le statu quo.
«Quand les lobbys sont puissants et écoutés et qu’il n’y a pas de volonté, c’est un cercle vicieux qui se met en place. On se retrouve avec deux camps opposés alors que cela devrait être aussi le choix des agriculteurs de travailler différemment.»
Néanmoins, comme l’explique la militante de la cause animale, les éleveurs ne doivent pas assumer seuls le poids d’un éventuel changement des pratiques, qui peut avoir des répercussions sur l’environnement.
«On constate les problèmes des algues vertes en Bretagne, de la pollution. Malheureusement, il n’y a pas de volonté politique pour accompagner les agriculteurs, les éleveurs, qui ont pris des habitudes, qui à la limite ne se posent pas de questions et n’ont pas envie de changer. L’État doit les aider à évoluer, car c’est dans l’intérêt général», avance Muriel Arnal.
Une position partagée par L214, qui propose notamment de les accompagner «vers des productions alternatives, vers une reconversion dans le domaine de leur choix et en redirigeant les aides pour enfin soutenir des systèmes moins intensifs.»
Prévenir les nouvelles zoonoses
Par ailleurs, pour la fondatrice de One Voice, la crise du Covid-19 met en exergue la nécessité de modifier les systèmes de production.
«On connait la dangerosité de l’élevage intensif, notamment à cause des zoonoses [maladies transmises par l’animal à l’homme, ndlr]. Les cochons, par exemple, sont porteurs d’énormément de maladies pouvant potentiellement toucher les humains.»
Selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), la majorité (60%) des maladies infectieuses humaines sont zoonotiques.
«C’est le plus grand risque des fermes industrielles pour la santé humaine.»
Or, d’autres facteurs tels que le changement climatique, la «demande humaine accrue en protéines animales», ou encore «l’intensification de pratiques agricoles non durables» favoriseraient l’émergence des maladies zoonotiques, pointait un rapport du Programme des Nations unies pour l’environnement (PNUE), publié en juillet dernier.
Autant d’éléments qui font dire à Muriel Arnal:
«Est-ce que l’on a encore le temps d’attendre pour changer nos pratiques?»