Bien que la situation sanitaire reste pesante en France, comme l’a indiqué jeudi 13 novembre Jean Castex, les médecins français ont tiré des leçons de la première vague de Covid-19 et luttent avec plus de succès contre l’épidémie, comme le confirme l’exemple des soignants de l’hôpital d’Argenteuil (Val-d’Oise) interrogés par Libération.
«On détecte beaucoup plus tôt les patients dont le sang est insuffisamment oxygéné alors même qu’ils n’ont pour tout signe clinique qu’une respiration rapide. On les place plus vite sous respirateur. On n’intube plus qu’en cas de nécessité absolue et le plus tard possible. Même s’ils n’évitent pas toujours la réa, ils se remettent plus facilement. Le taux de létalité est tombé de 40% durant la première vague Covid à 25% aujourd’hui», confie le docteur Gaëtan Plantefeve.
D’ailleurs, les médecins font tout pour éviter de placer les patients en réanimation, même s’il y a beaucoup de places libres. «À partir d’un certain âge, la réanimation est disproportionnée», explique au quotidien l’un des professionnels de santé qui estime qu’il s’agit d’une véritable «épreuve» pour l’organisme des personnes âgées ou de celles souffrant de lourdes pathologies.
Le Dr Plantefeve se félicite du fait que les pronostics alarmistes concernant la deuxième vague pour l’Île-de-France se sont révélés inexacts. Mais a du mal à expliquer cela seulement par le nouveau confinement qui «sans doute» a aidé.
«La vérité, c’est qu’on ne sait pas ce qu’il se passe. Est-ce le cycle naturel de la pandémie? Le signe d’une plus grande vigilance de la population? Le début d’une immunité collective? Ce qui est sûr c’est que, dans le Val-d’Oise, la cinétique de l’épidémie n’a rien à voir avec mars», ajoute le médecin.
Un membre de l’équipe de réanimation estime lui aussi que ses collègues sont «loin du stress du printemps quand certains travaillaient en tenue de cosmonautes»:
«On connaît mieux la pathogénicité du virus. Ce n’est pas Ebola et on est équipés. On ne rentre plus chez nous avec l’angoisse de contaminer nos proches. La peur a disparu».
Où sont les non Covid?
Dans cette situation, les médecins de l’hôpital s’interrogent sur l’absence des patients qui souffrent d’autres maladie.
«Je ne sais pas où sont passés les infarctus, les AVC, les embolies pulmonaires, les traumatologies […] Trois semaines qu’on ne les a pas vus. On ne refuse pas les non Covid: ils ne viennent pas. Je ne me l’explique pas», indique le Dr Damien Contou.
Les soignants fatigués
Même si le choc sanitaire a été évité dans cet hôpital, ce sont toujours les soignants qui portent le lourd fardeau face au nombre de patients qui souvent les dépasse.
«On tourne à une infirmière pour trois patients, alors que le seuil légal, c’est 2,5 […] Les filles râlent quand elles entendent que dans certains hôpitaux, c’est une infirmière pour deux. Ici, elles sont obligées de renoncer à leurs congés, et font jusqu’à 18 gardes de plus par mois. C’est rémunéré en heures supplémentaires heureusement. Mais c’est épuisant et très compliqué à gérer», indique leur cadre de santé, Céline Abella, qui ajoute que le personnel manque «cruellement».
D’après l’une des infirmières, leur situation est exacerbée par l'absence des psychologues qui au cours du printemps travaillaient à leurs côtés pour soutenir les familles des défunts. À cela s’ajoute que des proches des victimes du Covid-19 ne font pas parfois preuve de précaution face à la maladie et se mettent en danger eux-même ainsi que le personnel.