Grève sanitaire: «il est important de dénoncer cette mascarade de protocole sanitaire»

Les enseignants sont en colère. L’objet de leur courroux: l’absence d’un protocole sanitaire «digne de ce nom». Syndicats et élèves ont manifesté ce mardi 10 novembre afin que le gouvernement durcisse les mesures sanitaires anticoronavirus dans les établissements scolaires. Sputnik était sur place.
Sputnik

«Pas de protocole, pas d’école.» C’est un des messages que l’on pouvait lire sur une pancarte brandie par une manifestante ce mardi 10 novembre dans les rues de Paris. Plusieurs syndicats d’enseignants –dont FSU, FO, la CGT, le Snalc, le SNCL-FAEN et SUD-Éducation– ont appelé à la «grève sanitaire». Le but: enjoindre le ministère de l’Éducation nationale à renforcer le protocole sanitaire dans les établissements pour mieux lutter contre l’épidémie de Covid-19.

​Pourtant, sous la pression des enseignants, Jean-Michel Blanquer avait déjà annoncé le 5 novembre dernier un renforcement des mesures en laissant par exemple le choix aux chefs d’établissement d’augmenter le nombre de cours à distance, sous réserve de conserver au moins 50% de classe en présentiel pour chaque élève.

Absence d’anticipation du gouvernement

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Conscient des difficultés de préparer le baccalauréat dans ces conditions exceptionnelles, le ministre a également annoncé des adaptations, notamment l’annulation des épreuves d’évaluations communes des bacs de Première et Terminale au profit du contrôle continu. En outre, selon des informations de l’AFP, le ministère de la Santé  mettra un million de tests antigéniques à la disposition des personnels.

Des mesures qui ne semblent pas satisfaire les professeurs présents à la manifestation du jour. Interrogée par Sputnik, Emmanuelle, une enseignante en Seine-Saint-Denis, estime qu’il faut mettre en place des dédoublements de classe mais «partout, de façon nationale, équitable». Jean-Michel Blanquer avait quant à lui plaidé pour une «souplesse locale».

«Il est important d’être là pour dénoncer la mascarade de la mise en œuvre d’un protocole sanitaire digne de ce nom car ce n’est pas le cas», tonne Emmanuelle.

Un des griefs que fait l’enseignante au gouvernement est son «absence d’anticipation». Un sentiment partagé par la cosecrétaire du syndicat enseignant SNES dans le Loiret. Dans une interview donnée à France Bleu, Sylvie Lesné explique que, depuis la rentrée scolaire, elle constate que «les couloirs sont bondés, il y a des bousculades parce que les sens de circulation ne peuvent pas être respectés.» Le hastag #balancetonprotocole a d’ailleurs vu le jour pour dénoncer une situation chaotique depuis le reconfinement.

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«On a un peu le sentiment que jusque-là, le ministre de l'Éducation nationale a un peu joué avec la santé des personnels», souligne Sylvie Lesné.

Du côté des parents et des élèves, l’inquiétude est de mise. Des lycéens ont également protesté contre l’absence de mesures sanitaires fortes ce mardi 10 novembre en tentant, à nouveau, de bloquer leurs établissements. Selon le rectorat de Paris, cinq tentatives ont été recensées dans la capitale.

«Le protocole commence à être mis en place dans les lycées, mais les collèges et les écoles sont complètement laissés de côté. Ce n’est pas normal, c’est absolument scandaleux», fustige l’enseignante.

D’autant que le Conseil scientifique rappelle dans sa note du 26 octobre que «les adolescents de 12 à 18 ans semblent avoir la même susceptibilité au virus et la même contagiosité vers leur entourage que les adultes».

Éviter la fermeture des écoles

C’est pourquoi il importerait d’appliquer les mêmes mesures, au risque d’aboutir «malheureusement à la fermeture totale des établissements et ce n’est pas ce que l’on souhaite», prévient Emmanuelle.

​Des fermetures qui pourraient avoir des conséquences dramatiques pour l’avenir des élèves. Comme le rapporte Europe 1, le ministère de l'Éducation nationale a dévoilé les résultats des évaluations réalisées à la rentrée, post-période de confinement, et ils sont pour le moins inquiétants. Ils montrent en effet une baisse générale du niveau, les plus importantes concernant les classes de CP et de CE1. En outre, les écarts se creusent entre les élèves en éducation prioritaire et les autres.

Ariane, enseignante dans le premier degré en école élémentaire, pointe quant à elle les problèmes d’effectifs: «Dès que des collègues sont absents, ils ne sont pas remplacés, les enfants sont répartis dans d’autres classes.» Ce qui a pour incidence «de mettre à mal tout le protocole sanitaire que nous essayons d’appliquer dans les écoles». Elle espère que l’exécutif procédera à des recrutements massifs et immédiats.

​Autant de problématiques que le gouvernement devra résoudre. Guislaine David, secrétaire générale du Snuipp-FSU, a d’ores et déjà prévenu:

«C'est une grève en forme d'avertissement. Il va falloir que le ministère y réponde car la question des remplacements va devenir de plus en plus problématique dans les semaines qui viennent. La profession risque de craquer.»
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