Au Mali, la «déclaration de biens» est sur toutes les lèvres. Récemment entrées en fonction, les autorités de la transition –représentées par le Président Bah N’daw, le vice-Président Assimi Goïta et le Premier ministre Moctar Ouane– sont déjà épinglées pour un premier manquement présumé.
Or, la Constitution malienne dispose, dans son article 37, que le Président de la Cour suprême doit recevoir «publiquement la déclaration écrite des biens» du Président de la République après la cérémonie d’investiture dans un délai de 48 heures. La Charte de la transition adoptée le 12 septembre et publiée le 1er octobre au Journal officiel (JO) de la République du Mali élargit cette disposition au vice-Président et à tous les autres membres des organes de la transition.
Pour rappel, cette charte a été adoptée à la suite du coup d’État militaire du 18 août dernier contre le Président Ibrahim Boubacar Keita. À ce titre, elle fait office de petite Constitution, à côté de la loi fondamentale malienne qui reste valide.
Sur la Toile, des internautes s’impatientent, des personnalités maliennes et étrangères aussi. On s’interroge sur les raisons pour lesquelles ces autorités, pourtant censées incarner un renouveau, et être mieux en phase avec les aspirations populaires, ne se sont toujours pas acquittées de cette obligation constitutionnelle et éthique.
Moussa Mara, ancien Premier ministre du Mali et expert-comptable de profession, demande aux nouvelles autorités des éclaircissements sur la déclaration des biens.
Dans un délai minimum d’un mois avant la fin de la transition, le Président de la Cour suprême est censé recevoir une seconde déclaration écrite. Cette dernière est publiée au JO accompagnée de justificatifs éventuels en cas d’augmentation du patrimoine. Il est précisé dans la Charte que cette obligation s’applique aussi à tous les membres des organes de la transition à «l’entrée» et à «la fin» de leurs fonctions.
Discrédit sur la transition?
Pour l’analyste politique Salia Samaké, la non-déclaration des biens des autorités est de nature à «jeter le discrédit» sur ces dernières –ce qui est plutôt malvenu au début d’une transition.
Selon Alifa Habib Koné, avocat spécialiste des questions de lutte contre la corruption, un tel manquement ne saurait rester sans sanction.
«S’il s’avère que les autorités n’ont pas déclaré leurs biens, elles sont dans l’illégalité totale et la sanction, c’est normalement la révocation ou la perte du poste électif», explique Alifa Habib Koné à Sputnik.
Au Mali les Présidents de la IIIe République, notamment, le professeur Alpha Omar Konaré (1992-2002) et le général Amadou Toumani Touré (2002-2012), se sont soumis à la loi fondamentale du pays en déclarant leurs biens au début de leurs quinquennats respectifs.
Le 6 septembre 2018, deux jours après sa prestation de serment après sa réélection, l’ex-Président Ibrahim Boubacar Keita s’était également plié à l’exercice, après avoir manqué de le faire publiquement en 2013 lors de son accession au pouvoir.