Sextapes et nudes, le phénomène à la mode au Cameroun

Les sextapes et les nudes ont pris place dans les habitudes des Camerounais. Avec la démocratisation des smartphones, ils sont de plus en plus nombreux à enregistrer leurs moments d’intimité. Des contenus érotiques privés qui se retrouvent parfois sur la Toile, alimentant le buzz dans une société de plus en plus voyeuriste.
Sputnik

Un nude, une vidéo d’une célébrité ou d’un anonyme en pleins ébats sexuels sur les réseaux sociaux, le phénomène est devenu récurrent au Cameroun. Avec la forte pénétration des smartphones dans le pays, beaucoup se sont lancés dans la pornographie amateur en filmant des séquences de leurs relations intimes.

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Une tendance qui tend à rentrer dans les habitudes locales. Étudiante dans une école de formation à Yaoundé, Jessie S avoue avoir dans son téléphone des photos et vidéos plutôt osées.

«J’ai cette habitude de faire des photos de moi toute nue. Il m’arrive de les effacer juste après ou de les conserver pendant quelques jours. C’est seulement pour mon plaisir à moi. J’ai déjà également enregistré un moment d’intimité avec mon compagnon. C’était une belle expérience», confie-t-elle à Sputnik.

Des contenus qui se retrouvent sur la Toile

«C’est vrai que j’ai déjà réalisé une sextape mais j’ai effacé la vidéo moins de trente minutes après, craignant que quelqu’un d’autre ne tombe dessus parce que je suis du genre négligeant», avoue Claude Kuete, commerçant à Yaoundé. Si certains se sont mis en scène volontairement, d’autres sont tout simplement pris au piège malgré eux par leur partenaire. Beaucoup, comme Amélie NG, jeune caissière dans un supermarché à Douala, en ont souffert.

«J’étais tombée sur une image de moi en pleins ébats sexuels avec mon petit ami de l’époque dans un groupe WhatsApp. Il l’avait enregistrée sans mon consentement. Le pire, c’est que l’on ne voyait que mon visage, je ne saurais dire comment c’est arrivé là», confie-t-elle à Sputnik.  

Des images qui finissent par se retrouver malheureusement sur la Toile, souvent à la suite d’une mauvaise manipulation ou la perte de son téléphone. Personnalités publiques comme citoyens lambda, beaucoup se sont réveillés un matin en constatant que des photos ou des vidéos indécentes d’eux circulaient sur Internet.

Fin 2019, par exemple, une sextape du footballeur international camerounais Clinton Njié a fait irruption sur le web, suscitant un buzz monumental. Un fait attribué par ce dernier, à l’époque, à une mauvaise manipulation de son téléphone.

Et tout récemment, les nudes d’une célèbre femme des médias camerounaise ont accidentellement fait irruption dans les terminaux des internautes camerounais. Celle-ci a expliqué plus tard que son téléphone avait été volé et que c’est ainsi que ces images intimes se sont retrouvées sur la place publique.

Smartphone, le carburant du voyeurisme?

Ainsi, la Toile est devenue, depuis le boom des réseaux sociaux, une galerie d’images et de vidéos pour adultes. Seulement, comment expliquer cette tendance qu’ont les Camerounais à filmer les séquences de leurs ébats sexuels?

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Décryptant ce phénomène devenu viral, le Dr Nobert Nadje, psychosociologue et enseignant à l’université de Douala, souligne que «ces pratiques ne sont pas coutumières de la manière africaine de faire les choses. Il faut les inscrire dans une logique de globalisation car l’Afrique est très influencée par l’Occident».

«Ce phénomène est également à inscrire dans le fantasme humain. C’est ce que l’on appelle, en psychologie, les états de perversion qui procurent au sujet un sentiment de bonheur et même de supériorité. De ce fait, avoir un rapport sexuel peut être considéré comme un exploit et l’homme qui filme ses ébats sexuels veut fournir la preuve de cet exploit-là», renchérit-il au micro de Sputnik.  

Si la possession d’un smartphone fait partie des éléments déclencheurs de ce type de fantasme, les mobiles sont à aussi rechercher, selon le psychosociologue, «dans le registre de l’effet de mode. Car c’est un phénomène très actuel. Beaucoup de personnes ont déjà essayé de se prendre en photo ou en vidéo, même si elles n’ont pas publié».

Des contenus qui trouvent preneurs dans une société de plus en plus voyeuriste, où le «tout-montrer» est désormais à la mode. Si le phénomène des sextapes est récent au Cameroun, cette pratique devenue monnaie courante met à nu, de l’avis de l’expert, une autre facette de la sexualité de plus en plus débridée dans un pays où toute pudeur semble avoir disparu.

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