Avec l’annulation des festivals et la fermeture des discothèques, les personnes en manque de musique s’amusent en «free party». Sur fond de musique électronique, ces fêtes clandestines réunissent quelques dizaines voire plusieurs milliers de personnes. Depuis la fin du confinement, elles se multiplient à travers la France. C’est notamment le cas en Lozère où environ 10.000 personnes se sont rassemblées le 10 août, ou encore en Essonne le week-end du 14 au 15 août quand 300 fêtards se sont donnés rendez-vous.
Une situation qui exaspère les habitants des communes avoisinantes qui se plaignent du bruit, de l’état des lieux après les festivités avec la présence de nombreux détritus et dans le pire des cas, des destructions de récolte.
Gestes barrières oubliés
Contexte de crise sanitaire oblige, les autorités locales dénoncent également le non-respect des gestes barrières comme le port du masque ou la distanciation sociale. Avec une circulation du virus qui s’intensifie en France et la tenue d’une fête libre réunissant 500 personnes dans un bois de Toul, près de Nancy (Meurthe-et-Moselle), l’agence régionale de Santé (ARS) a dû intervenir.
L’ARS a ainsi lancé un appel relayé par la préfecture pour inviter les participants à se faire dépister car selon l’organisme, «la majeure partie des participants n’a pas respecté la distance de précaution (un mètre) et ne portait pas de masque». «Il y a donc un grand risque que le virus ait circulé très activement entre les personnes au cours de ce rassemblement et que vous deveniez porteur(euse) du virus sans le savoir», prévient-elle.
«Ma première réaction a été une réaction de colère. Dans les jours qui viennent, on va guetter avec attention les chiffres de l’évolution de l’épidémie dans notre département», déplore au micro d’Europe 1 Marie-Blanche Bernard, secrétaire générale de la préfecture de Meurthe-et-Moselle.
Jean Castex a annoncé le 11 août que l’interdiction des rassemblements de plus de 5.000 personnes sera prolongée jusqu’au 30 octobre.
«À Toul, la rave party a eu lieu sans l’accord du préfet qui l’avait au préalable interdite. Cela n’a pas empêché les "teufeurs" de venir. Finalement, que ce soit 5.000 ou 10.000, manifestement les organisateurs n’ont aucune espèce de considération pour ce type de mesure sanitaire et de réglementation par rapport au Covid-19», analyse dans un entretien à Sputnik Thierry Vallat, avocat au barreau de Paris.
Il souligne qu’il y a déjà aujourd’hui une obligation de déclaration [en préfecture, ndlr] au-delà de 500 personnes, donc c’est une manifestation [Lozère, ndlr] qui devrait de toute façon être interdite. Par ailleurs, il existe également «des arrêts préfectoraux qui vont appuyer, en plus de la loi», souligne l’avocat.
Des sanctions pas assez dissuasives
Actuellement en France, selon les ministères et les organisateurs, près de 4.000 fêtes libres ont lieu chaque année, dont 800 comptant au moins 500 participants. Alors qu’elles nécessitent une autorisation, il n’y aurait que deux récépissés de déclaration par an. Comment l’expliquer?
«Tout simplement parce que les participants ne sont pas sanctionnés. Seuls les organisateurs le sont mais très peu. En 2018, il y a eu 70 condamnations et simplement deux confiscations de matériels», constate Me Vallat.
Dans les faits, les organisateurs risquent une contravention de cinquième classe, soit de 1.500 euros maximum et une saisie du matériel.
Du côté des participants, «la seule sanction qui peut intervenir c’est si vous êtes surpris sur le terrain de quelqu’un qui n’a pas donné son autorisation». Or Me Vallat indique que «pour la majorité des rave-parties qui ont lieu, l’agriculteur, car ce sont souvent des champs ou dans les zones rurales que ça se passe, donne son d’accord.»
Pourtant, pour Thierry Vallat, «c’est la seule chose qui peut véritablement permettre la possibilité d’avoir un petit peu moins de rave parties sauvages non déclarées parce que sinon ça va continuer, Covid-19 ou pas et ça ne changera pas grand-chose.»