Science vs religion: Alger maintient le sacrifice du mouton de l’Aïd el-Kébir en dépit de l’avis de médecins

«La commission de la Fatwa a tranché sur un sujet qui a suscité une grande polémique en maintenant le rituel de l’Aïd el-Kébir», a affirmé le ministre algérien des Affaires religieuses et des Waqfs, soulignant que le Comité scientifique Covid-19 a été consulté. Deux appels avaient été lancés par des médecins pour l’annulation de ce rituel.
Sputnik

En dépit des appels lancés les 18 et 27 juillet aux Algériens par deux collectifs de professeurs en médecine, aux premières loges dans la lutte contre l’épidémie du Covid-19, pour renoncer au sacrifice du mouton de l’Aïd el-Kébir à cause du haut risque de contagion, le ministre des Affaires religieuses et des Waqfs, Youcef Belmahdi, a réaffirmé mardi 28 juillet sur les ondes de la Chaîne 1 de la Radio nationale algérienne son soutien à la commission nationale de la Fatwa qui a opté pour le maintien de ce rituel.

«La commission de la Fatwa [avis jurisprudentiel religieux, ndlr] a tranché sur un sujet qui a suscité une grande polémique en maintenant le rituel de l’Aïd el-Kébir», a déclaré le ministre.

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Bien que d’un point de vue religieux ce rituel ne soit pas obligatoire et que parmi les professeurs de médicine signataires de l’appel du 27 juillet figurent deux membres du Comité scientifique en charge du suivi de l’épidémie du coronavirus, M.Belmehdi a affirmé que «le retard qu’a pris la commission [de la Fatwa, ndlr] pour émettre son avis sur la question est dû à son souci de collecter toutes les informations de la part du Comité scientifique chargé du suivi du Covid-19».

Ainsi, Youcef Belmahdi a souligné que la commission de la Fatwa a rendu son verdict en concertation avec le Comité scientifique de surveillance de l’épidémie du Covid-19. «Nous avons essayé de sortir avec un avis qui puisse constituer un consensus, tant du point de vue religieux que scientifique», a-t-il soutenu.

Par ailleurs, le responsable a suggéré aux Algériens de sacrifier leurs bêtes dans les abattoirs agréés par l’État dans le cadre d’un respect scrupuleux des consignes d’hygiène sanitaires afin de minimiser au maximum le risque de contagion.

L’appel des experts de la Santé

Les Algériens appelés par des médecins à renoncer au sacrifice de l’Aïd el-Kébir
Mardi 27 juillet, un collectif de professeurs de médecine, dont trois épidémiologistes et deux membres du Comité scientifique, ont signé un communiqué appelant les Algériens à renoncer cette année au sacrifice de l’Aïd el-Kébir à cause du risque grandissant de contagion, a rapporté le site d’information Tout Sur l’Algérie (TSA).

En effet, dans un contexte de résurgence de la maladie dans le pays, ces médecins ont rappelé que «les données du ministère de la Santé […] tendent à démontrer quotidiennement une alarmante persistance de la circulation du virus au sein de la population».

Selon ces professeurs, «les regroupements créés par les événements à caractère familial (mariages, funérailles…) ou religieux (l’Aïd el-Fitr) ont été pointés comme facteurs directement responsables de la flambée épidémique, anéantissant tous les efforts et sacrifices consentis depuis le début de la riposte».

Enfin, ils ont mis l’accent sur le fait que tout relâchement sanitaire «compliquerait singulièrement la riposte et annihilerait tous les efforts d’endiguement entrepris jusque-là».

Le dernier état des lieux

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Le maintien du sacrifice du mouton intervient alors que le corps médical est dans un état d’épuisement et de démoralisation, selon certains experts. En effet, dans une déclaration faite dimanche 26 juillet à la Chaîne 3 de la Radio nationale algérienne, le président du Syndicat national des praticiens de santé publique (SNPSP), le Pr Lyes Merabet, a fait état «de 80 morts et plus de 3.500 infectés» confirmés parmi les personnels soignants.

Le mardi 28 juillet, le Pr Djamel Fourar, porte-parole du Comité scientifique, a fait état lors d’un point presse de 642 nouveaux cas de contamination. Il a souligné que le total des cas confirmés depuis le début de la maladie en Algérie s'élevait à 28.615, soit 1,5 pour 100.000 habitants, dont 1.174 décès et 19.233 guérisons.

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