Depuis l’annonce de la promotion de Gérald Darmanin au ministère de l’Intérieur, les féministes sont vent debout. Ce mardi 7 juillet matin, une vingtaine de militantes se sont rassemblées aux abords de la place Beauvau, scandant «Darmanin violeur, État complice!» Les activistes ont également brandi des pancartes avec l’inscription «Darmanin à l’Intérieur, vous vous torchez avec nos plaintes».
D’autres se sont réunies dans l’après-midi, Place de la Madeleine, criant «Darmanin nommé, victimes méprisées!» et munies de panneaux où l’on pouvait lire «La culture du viol est en marche». Interrogée par Sputnik, Laura, une manifestante, explique que
«Le fait qu’il soit nommé en tant que ministre de l’Intérieur, à la tête d’une police qui prend peu les plaintes pour viol, c’est complètement de l’hypocrisie de la part du gouvernement qui considérait que l’égalité hommes/femmes était la grande cause du quinquennat.»
Un sentiment exacerbé par les récentes déclarations de l’entourage du Président de la République. En effet, un proche d’Emmanuel Macron a déclaré que la plainte pour viol qui vise Gérald Darmanin «n’a pas fait obstacle» à sa promotion, selon des propos révélés par l’AFP. «Il semble que les choses vont dans le bon sens», a également avancé cette source au sujet de la plainte, sans apporter plus de précision. L’Élysée ne fait «jamais de commentaire sur les affaires en cours», a-t-elle néanmoins ajouté, séparation des pouvoirs oblige.
«C’est un choc»
Et la présomption d’innocence? Si pour Laura, le nouveau locataire de la place Beauvau n’est effectivement pas «condamné, mais en procédure», le signal envoyé reste «dérangeant», car susceptible de «déconsidérer la parole des victimes».
Une autre militante présente à quelques encablures du ministère de l’Intérieur abonde dans son sens. Selon elle, cette nomination donne l’impression «que l’on n’écoute pas les victimes d’oppressions». Par ailleurs, avec cette plainte, «ça fait de lui quelqu’un dont l’exemplarité est mise en doute», poursuit-elle.
«Rien que pour cette raison, on ne peut pas en faire une personnalité politique avec autant de pouvoir», estime la féministe.
Invitée sur Europe 1 ce mardi 7 juillet, Me Élodie Tuaillon-Hibon, l’avocate de Sophie Patterson-Spatz, la femme qui accuse Gérald Darmanin de l’avoir violée en 2009, a affirmé que «cette nomination, c’est un choc, je ne vais pas le cacher».
Nous nous demandons comment ça va se passer lorsque le premier flic de France [sera] interrogé dans le bureau d’un magistrat instructeur alors qu’il est en exercice.»
Après deux ans de bataille procédurale, la cour d’appel de Paris avait ordonné début juin dernier la reprise des investigations sur les accusations de viol, harcèlement sexuel et abus de confiance portés contre le ministre.
Deux affaires pour Darmanin
Entendu lors d’une audition libre en février 2018, Gérald Darmanin a confirmé avoir eu une relation sexuelle avec la plaignante, mais selon lui librement consentie et à l’initiative de cette dernière. Une deuxième accusatrice, une habitante de Tourcoing, ville dont le ministre fut maire de 2014 à 2017, avait porté plainte pour «abus de faiblesse», affirmant que l’élu lui avait demandé des faveurs sexuelles en échange d’un relogement. Cette procédure a été classée sans suite par le parquet de Paris au printemps 2018. Gérald Darmanin avait alors qualifié cette accusation de «nouvelle calomnie».