Non, l’euro n’explosera pas, l’Allemagne fait la paix avec la BCE

Le contentieux entre la Cour constitutionnelle allemande et la Banque centrale européenne a pris fin. Les députés allemands ont finalement donné leur blanc-seing aux programmes d’aide de la BCE. La juridiction suprême allemande avait entamé un bras de fer avec la Banque centrale européenne, menaçant de faire exploser toute la zone euro.
Sputnik

Les opposants à l’euro avaient entrevu un espoir. Il s’est envolé le 2 juillet. La monnaie unique sera encore, au moins pour un certain temps, une réalité. Une très large majorité de députés allemands a voté une motion de soutien aux politiques de rachats massifs de dettes par la Banque centrale européenne.

​La fin d’un feuilleton qui a commencé le 5 mai avec un arrêt pris par la Cour constitutionnelle allemande de Karlsruhe. Les juges suprêmes avaient fait trembler les europhiles, en jugeant excessifs et pas assez «proportionnés» les programmes de rachats d’actifs de la Banque centrale européenne (BCE). Cette dernière a injecté la bagatelle de 2.600 milliards d’euros dans les marchés depuis 2015. Les sages allemands avaient exigé que l’institut monétaire basé à Francfort et les autorités allemandes justifient ces programmes dans un délai de trois mois.

L’Allemagne ne veut pas de la fin de l’euro

Cette affaire avait fait vaciller la zone euro et montré que, malgré le chemin fédéraliste emprunté depuis le traité de Maastricht en 1992, une juridiction nationale pouvait remettre en cause la politique menée à l’échelle européenne. La Cour constitutionnelle allemande avait brandi la menace suprême: la fin de la participation de la Bundesbank, la Banque centrale allemande, au financement des plans d’aide de la BCE. Un tel scénario aurait tout simplement rendu impossible la poursuite du soutien économique de la BCE, qui aurait alors été privée de la puissance de la première économie d’Europe.

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Les opposants à la monnaie unique avaient alors imaginé voir l’euro exploser. Il n’en sera pour le moment rien. Yves Mersch, membre du directoire de la BCE, l’a confirmé lors d’un discours prononcé le 2 juillet. Il a assuré que désormais, il n’y a «aucun obstacle à ce que la Bundesbank poursuive ses achats» de dette.

La Banque centrale européenne a apporté des éléments de réponse qui ont été de nature à séduire les principaux groupes parlementaires de la chambre des députés allemands, réussissant apparemment à démontrer la «proportionnalité» des programmes de la BCE. Pourtant, face à la crise économique historique provoquée par la pandémie de coronavirus, la BCE a sorti la sulfateuse à liquidités. Afin de contrer la récession record qui devrait être de -8,7% en 2020 pour la zone euro, elle a mis en place depuis la mi-mars un programme de rachat de dette publique et privée (PEPP) d’un montant record de 1.350 milliards d’euros. Cela représente plus de 10% du PIB de l’eurozone. Le programme sera effectif jusqu’à fin juin 2021.

Malgré une philosophie favorable à l’orthodoxie budgétaire, les députés allemands ont considéré que leur pays «a un intérêt supérieur à ce que l’avenir de la monnaie commune soit préservé».

Affaire «classée»

Les partis de la coalition gouvernementale, composée des conservateurs d’Angela Merkel, des sociaux-démocrates ainsi que de deux groupes d’opposition, écologistes et Libéraux, ont tous voté la motion. Seuls les partis les plus à gauche et les plus à droite ne l’ont pas soutenue.

Avant ce vote, Olaf Scholz, ministre allemand des Finances, avait déjà qualifié les interventions de la BCE de «proportionnées».

Dès le 25 juin, l’institut monétaire avait indirectement apporté aux juges constitutionnels allemands ses éléments de réponse. Considérant n’avoir de comptes à rendre qu’à la justice européenne –qui avait adoubé les rachats de dette en 2018 –, la BCE s’était en effet contenté de publier un document sur son site Internet.

​Le document publié sur le site de la BCE expliquait ses décisions et souhaitait démontrer que l’absence de plan de soutien aurait été bien pire pour l’économie de la zone euro. Yves Mersch a assuré que la BCE prenait l’analyse des «risques potentiels» et des «effets secondaires» de ses décisions au sérieux. Une attitude qui devrait selon lui «aider à une communication plus équilibrée de [nos] décisions dans tous les pays, y compris l’Allemagne».

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La Cour de Karlsruhe considère désormais l’affaire comme «classée» et ne se prononcera pas à nouveau «d’office» sur le sujet, une fois les réponses de la BCE apportées, comme l’a expliqué à l’AFP un porte-parole de la Cour.

Cependant, elle pourrait à nouveau s’en saisir «si de nouveaux recours étaient déposés tendant à montrer que les conditions posées n’ont pas été remplies», explique l’AFP.

De fait, outre-Rhin, de nombreux eurosceptiques ne comptent pas en rester là. Peter Gauweiler, ancien chef de la CSU –le parti conservateur de Bavière– et l’un des requérants dans l’affaire jugée le 5 mai, a prévenu le 1er juillet dans le quotidien Süddeutsche Zeitung:

«Nous jugerons sur pièces si les conditions pour que la Bundesbank continue à participer» aux plans d’aide de la BCE «ont été remplies».

Et d’ajouter que dans le cas contraire, il demanderait «que ce soit interdit».

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