La Turquie a lancé des opérations militaires en Libye, en Irak, en Syrie. Elle possède des bases au Qatar et en Somalie. Elle s’affirme avec agressivité dans l’Est de la méditerranée. Pour autant, assiste-t-on réellement à l’émergence d’un nouvel empire ottoman?
Pour Didier Billion, directeur adjoint de l’IRIS, l’Institut des Relations Internationales et Stratégiques, cette image n’est pas réaliste. Retrouvez dans ce nouveau Désalliances, l’intégralité de notre entretien avec ce spécialiste de la Turquie, auteur de nombreux ouvrages sur ce pays et sur la région du Moyen-Orient.
L’auteur de La politique extérieure de la Turquie (Ed. l’Harmattan) considère aussi que l’idée qu’Erdogan soit un «frériste», un membre des Frères musulmans*, organisation considérée comme terroriste par de nombreux pays, relève du fantasme.
Tordant donc le cou à des idées préconçues, Didier Billion estime que les succès de la Turquie en Libye sont bien réels, mais qu’il convient encore d’attendre pour savoir si Ankara s’y installe durablement, comme elle le fait déjà dans le nord de la Syrie. Après tout, ce conflit libyen est loin d’être fini.
Par contre, à l’Est, rien de nouveau. Car en Irak, la récente opération militaire lancée par la Turquie est pour Billion largement critiquable. Erdogan ne fait que s’embourber davantage dans un conflit avec les Kurdes du PKK, conflit qui dure depuis près de quarante ans.
Si les succès font gagner la Turquie en influence dans son environnement proche, les projections militaires d’Erdogan pourraient aussi être considérées comme de l’aventurisme… qui pourrait bien l’affaiblir sur la scène nationale.
*Organisation terroriste interdite en Russie