Crise de l’hôpital public: «On a un système de santé qui devient un système business»

En plein Ségur de la santé, les personnels hospitaliers se mobilisent pour dénoncer leurs conditions de travail. Alors que le pic de l’épidémie de Covid-19 est passé, ils attendent désormais des gestes forts du gouvernement. Sputnik est allé à la rencontre des manifestants devant les hôpitaux Robert-Debré et Henri Mondor.
Sputnik

Le Ségur de la santé a-t-il déjà du plomb dans l’aile? À peine lancé, le syndicat SUD Santé Sociaux a annoncé mercredi 3 juin qu’il quittait la table des négociations. «Pendant la crise, le Président Macron a fait toute une série de promesses. Mais depuis le début des discussions, on ne voit rien venir», se justifie auprès de l’AFP son secrétaire Jean-Marc Devauchelle.

Des griefs que partagent les personnels soignants qui manifestaient ce jeudi 4 juin devant l’hôpital universitaire Robert-Debré à Paris, mais également à l’hôpital Henri Mondor à Créteil.

«On a claqué la porte car pour nous, c’est une vraie mascarade, ça ne sert à rien. Ils mettent en avant qu’ils ne connaissent pas les revendications des personnels portées par les syndicats alors que ça fait plus d’un an que ce sont les mêmes […]. C’est un énième plan de com’», s’insurge au micro de Sputnik Éric Tricot, infirmier-anesthésiste à l'hôpital Henri Mondor à Créteil, et membre de Sud Santé.

Devant l’hôpital Robert-Debré, la colère est également palpable.

Une vraie mascarade

Interrogé par Sputnik, André Grimaldi, professeur émérite en diabétologie à l'hôpital de la Pitié-Salpêtrière, présent au rassemblement devant l’hôpital Robert-Debré, explique qu’il y a une «méfiance chez les hospitaliers». Selon lui, le gouvernement fait «trop de discours» et «pas assez d’actes».

​«Il n’y a pas besoin de discuter deux mois pour savoir combien on augmente le salaire des aides-soignantes, des infirmières, des secrétaires, des assistantes sociales à l’hôpital. Le gouvernement ne discute pas indéfiniment pour dire qu’il met cinq milliards d’euros pour Renault. Donc il doit dire: le salaire sera augmenté de tant.»
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Et d’ajouter:

«Or, le gouvernement ne dit rien. Il dit: on augmentera significativement, mais ça veut dire quoi?», s’interroge le professeur Grimaldi.

Lors du discours inaugural du Ségur de la santé le 25 mai, le Premier ministre Édouard Philippe a indiqué qu’il ne s’agit pas nécessairement «de changer de cap, mais très certainement de changer de rythme».

Aucun changement de cap annoncé

Des déclarations qui passent mal chez Cherine Benzouid, cardiologue à l’hôpital Robert-Debré: «Nous, ce que l’on comprend, c’est que ces réformes libérales sont les bonnes et ça veut dire qu’il faut les continuer. On se dirige vers la casse de la réglementation du travail, la casse des 35 heures, faire des partenariats public-privé alors que la cour des comptes a déjà épinglé ces PPP pour les surcoûts», explique-t-elle à Sputnik.

​Si Agnès Buzyn, ex-ministre de la Santé expliquait volontiers qu’il fallait sortir de la logique de l’hôpital-entreprise, le professeur Grimaldi note que «l’intérêt financier dans l’activité est toujours là».

«On a un système de santé qui devient un système business. C’est-à-dire que je sélectionne mes activités: je fais de la chirurgie de l’obésité car c’est rentable. Je fais de la tyroïde car c’est rentable. Mais alors la personne âgée poly-pathologique, eh bien ce n’est pas pour moi», déplore le professeur André Grimaldi.

Appel à la mobilisation nationale le 16 juin

Autant de reproches que les syndicats vont tenter de faire entendre. Pour ce faire, 10 organisations ont appelé ce jeudi 4 juin à une «journée d’action nationale» le 16 juin afin de pousser le gouvernement à prendre en compte l’ensemble de leurs revendications

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