Malgré l’ouverture des terrasses à Paris, les petits cafés ne sont «pas sûrs de tenir» – vidéo

300.000 cafés et restaurants rouvrent ce mardi en France. Pourtant, 60.000 d’entre eux, situés en Île-de-France, dernière région en zone orange, voient leur activité limitée aux terrasses. Sputnik a fait le tour du centre historique de Paris pour recueillir les premiers témoignages des cafetiers.
Sputnik

Ce 2 juin au matin, Paris, inimaginable sans ses terrasses de cafés et restaurants, semble retrouver sa physionomie habituelle. Lieu de rencontres amoureuses et de scène de la «vie parisienne», bureau éphémère et open-space, point de brassage de l’opinion publique, les terrasses de la capitale prennent timidement leurs nouveaux points de repère post-pandémiques.

Malgré l’ouverture des terrasses à Paris, les petits cafés ne sont «pas sûrs de tenir» – vidéo

Belle image de «l’art de vivre à la française», la tradition des terrasses est soutenue par l’autorisation de la maire, Anne Hidalgo, de les agrandir sur demande ou d’en créer «gratuitement» sur des places de stationnement.

L’ombre de la faillite plane sur les quartiers touristiques

Une fois la déclaration sur la dimension de la terrasse et le nombre de tables déposée en mairie, la terrasse est gérée en conformité stricte avec les règles sanitaires: un mètre de distance entre chaque table, «même plus, parce que ça ne sert à rien d’en mettre trop sur un petit trottoir», explique Patrick à Sputnik. Le gérant du «Café de la Colonnade», une brasserie parisienne près du Louvre se montre modérément enthousiaste.

«Même si depuis ce matin, il n’y a personne, parce que nous sommes dans la zone touristique, ça permet de voir le quartier s’ouvrir», confie Patrick, philosophe, à Sputnik.

Sans travail pendant toute la durée de confinement, le gérant prend son mal en patience. Mais son sourire bienveillant est triste: «On a perdu 100% de notre chiffre d’affaires et la moitié de notre trésorerie. On n’est pas sûrs de tenir.»
«Si vous regardez autour, vous constatez que tous les magasins ont fermé suite aux Gilets jaunes, 45 jours de grève cet hiver, puis le Covid-19. Peut-être que nous les suivrons aussi. Les grandes enseignes ont repris, mais les petits commerces se préparent à la faillite», constate Patrick.

Le soleil brille de tous ses feux et la reprise au 23e jour de déconfinement pousse à l’enthousiasme, mais sur le terrain, les commerçants restent lucides et s’attendent à une année morose. Bruno Le Maire, ministre de l’Économie, a confirmé les difficultés à venir en annonçant ce 2 juin une contraction de 11% du Produit intérieur brut (PIB) français cette année.

Une terrasse offre une augmentation sensible de la capacité d’accueil

Pour le responsable de salle du «Café des Beaux-arts», une brasserie au début de la Rue Bonaparte, la reprise démarre sur les chapeaux de roue, puisque «prévenu au dernier moment», il n’a pas eu le temps de passer toutes ses commandes.

​Il en faut plus pour le déstabiliser, puisque le café a un atout géographique imparable: une petite place qui permet de multiplier par quatre la capacité de sa terrasse.

«On a une belle place devant nous, ça nous permet d’avoir un restaurant de plein air. On a installé une trentaine de guéridons supplémentaires», s’enthousiasme le responsable.

Camélia Jordana intervient et perturbe un contrôle de police en plein Paris
Autorisation de la mairie en poche, le gérant n’a qu’à installer des parasols pour accueillir les clients assoiffés. Si le gel hydroalcoolique à l’entrée est toujours bienvenu, la question du port de masque reste délicate. Il va falloir apprendre de nouvelles règles.

«Dès que l’on est installé à table, on peut retirer son masque. Quand on recommence à bouger, il faut le remettre», explique à Sputnik le responsable.

Malgré tous ces détails, le restaurateur est visiblement heureux de retrouver un peu de ses habitudes «après une période difficile» et servir au petit matin des p’tits cafés aux ouvriers du chantier proche.

Les clients, plutôt disciplinés, respectent les règles sanitaires

Il ne fallait pas s’attendre à moins d’entrain: la clientèle du mythique «Café de Flore» est au rendez-vous et à 9 heures du matin, la terrasse est déjà remplie, «dans les règles du protocole sanitaire», précise à Sputnik Thierry, le gérant de l’établissement, qui assure que ses «habitués sont rassurés».

«Dès l’ouverture, on a été envahis de clients, ça fait très plaisir. Mais nous sommes stricts sur l’entretien, avec un nettoyage de l’environnement –table, chaise, banquette– entre le départ d’un client et l’arrivée du suivant. Nous avons également prévu un sens de circulation», assure Thierry.

Un peu plus loin, David, le responsable du «Bar du Marché», un café branché avec une ambiance de bistrot typique, situé Rue de Seine, arbore son plus beau sourire, que l’on remarque malgré son masque.

​En plein soleil, une dizaine de clients est déjà installée en terrasse et le café se prépare pour le service de midi, «un gros challenge pour le premier jour d’ouverture».

«Pour un début, c’est super! Les gens respectent tous les consignes», se réjouit David au micro de Sputnik.

Avec l’annonce de ce matin que «le fonds de solidarité sera maintenu jusqu’à la fin de l’année 2020» pour les entreprises de la restauration, comme l’a déclaré ce matin Bruno Le Maire, les professionnels reprennent espoir. Même si pour l’instant, par crainte des nuisances pour le voisinage provoqué par les dérogations sur l’ouverture des terrasses, le respect des horaires sera surveillé par la police municipale.

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