«J’ai peur parce que c’est le grand flou! On a très peu d’information et toujours rien de précis.»
Larbi El'Bahraoui, gérant d’Elite 5 Soccer, complexe de terrains dédiés à la pratique du foot à 5, est inquiet. Si les secteurs de la restauration ou du tourisme commencent à recevoir des bribes d’informations quant à d’éventuelles réouvertures, pour les installations de foot en salle, aucune annonce concrète n’a été faite.
Pourtant, depuis le 11 mai, l’activité physique est de nouveau autorisée «sans limitation de durée, sans attestation, dans une limite de distance du domicile inférieure à 100 km, en limitant les rassemblements à 10 personnes maximum, en extérieur et sans bénéficier des vestiaires qui peuvent être mis à disposition pour les activités de plein air», d’après les recommandations du ministère des Sports. La pratique du foot à 5 contre 5 reste quant à elle proscrite.
Manque de considération
«La reprise progressive des activités en salle des sports de contact et des sports collectifs ne sera envisagée que dans un deuxième temps, en fonction de l’évolution de la pandémie, pour ne pas risquer la transmission du virus», a écrit sur Twitter Roxana Maracineanu, ministre des Sports.
Une absence de précision qui accentue l’incompréhension du gérant d’Elite 5 Soccer. Étant donné que «c’est une pratique qui entre dans les mœurs, il y a quand même près de 3 à 4 millions de joueurs en France. C’est gênant de ne pas avoir plus de retour de la part du gouvernement sur notre activité. Le foot à 5, c’est un domaine, lorsqu’on ferme, c’est une perte sèche, il n’y a pas de vente à emporter. Depuis que l’on est fermés, le chiffre d’affaires est à zéro, donc c’est très compliqué», explique-t-il au micro de Sputnik.
«Depuis le déconfinement, on voit des scènes où les gestes barrières ne sont pas respectés partout. On sait que c’est un sport de contact, donc on est conscient que l’on sera les derniers, mais on propose des choses simples pour réduire les risques.»
Au rang des solutions évoquées par Larbi El'Bahraoui, il y a l’utilisation «de masques de protection pour le sport. Un peu plus perfectionné que les masques en papier»; le «contrôle de la température des joueurs dès leur arrivée dans les locaux», l’instauration «des gestes barrières entre les joueurs et les personnes de l’accueil», ou encore, la «mise à disposition de gel hydroalcoolique». Par ailleurs, le gérant d’Elite 5 Soccer argue du fait que les joueurs sont «jeunes, entre 15 et 50 ans, des populations donc moins à risque».
Des faillites possibles
Autant d’arguments en faveur d’une reprise rapide. En effet, les mesures de confinement ont cassé la dynamique d’un secteur en plein essor. «Avant la crise, le marché continuait à croître et il y avait de bonnes perspectives d’avenir. L’offre augmentait et on était dans un cercle vertueux», confiait Olivier Lemesle, membre du cabinet d’études de marché Xerfi, au micro de France info. D’ailleurs, comme le mentionnait le site d’information, «le marché français du foot à 5, qui représentait 50 millions d’euros en 2014, tourne autour des 130 millions d’euros aujourd’hui, selon l’étude publiée par Xerfi.»
«J’ai de la chance d’avoir eu un peu de trésorerie avant le confinement. En plus, j’ai un bailleur qui est conciliant: on a trouvé un accord, ce qui est super, mais tous les bailleurs ne sont pas aussi conciliants. D’ici quelques mois, certains vont fermer», regrette Larbi El'Bahraoui.
Pour le patron d’Elite Soccer, qui a dû mettre ses six employés au chômage partiel, plus la situation s’éternisera, plus les difficultés augmenteront. «Depuis mi-mars, j’ai perdu entre 10 à 15% de mon chiffre d’affaires annuel. Malheureusement, cette période de fermeture est celle où l’on marche le mieux, car j’ai des terrains indoor [intérieur, ndlr], mais également outdoor [extérieur, ndlr]. Quand il fait beau, de mars à fin juillet, ça fonctionne très bien donc je suis doublement pénalisé», déplore-t-il.
L’État en soutien?
Gérald Darmanin, ministre de l’Action et des Comptes publics, a annoncé dimanche 14 mai lors de l’émission Le Grand Jury RTL-Le Figaro-LCI que le gouvernement allait exonérer de trois milliards d’euros de charges sociales des entreprises de secteurs particulièrement touchés par la crise sanitaire comme la culture ou encore le sport.
Premier rayon de soleil sur le terrain de foot à 5?
«Entre les annonces qui sont faites et ce qui est réalisé ensuite, ça peut être très différent. Il faudrait aussi une aide de l’État pour l’annulation des loyers, voire un étalement dans le pire des cas. Ce n’est pas de notre faute si le gouvernement nous a demandé de fermer, ni celle des bailleurs.»
Et d’ajouter,
«Cependant, il ne faut pas oublier que les assureurs doivent jouer leur rôle aussi, car on nous dit que la pandémie n’est pas dans les contrats, mais il y a l’empêchement d’accès au complexe, ce qui semble est notre cas», rappelle Larbi El'Bahraoui.
Si les perspectives économiques sont difficiles à prévoir, le patron d’Elite 5 Soccer peut compter sur la ferveur des joueurs.
Des joueurs impatients
«Ils sont comme des fous! Avec le confinement, tout le monde est resté à la maison, ils veulent se défouler sur les terrains, donc il y a une vraie demande. J’ai des policiers qui viennent régulièrement dans nos locaux, ils me demandent s’ils peuvent venir jouer», s’amuse Larbi El'Bahraoui.
«Les gens nous appellent, ils nous envoient aussi des messages de soutien, car ils comprennent que la situation est compliquée», conclut-il.